Un code du travail par établissement, c’est non08/06/20162016Journal/medias/journalarticle/images/2016/06/p3-dessin001.jpg.420x236_q85_box-0%2C160%2C499%2C440_crop_detail.jpg

loi travail

Un code du travail par établissement, c’est non

Depuis son adoption sans vote le 12 mai, par le biais de la procédure du 49.3, le projet de loi El Khomri, dit loi travail, a été transmis au Sénat. Le gouvernement avait accepté d’en gommer certains des aspects les plus choquants, par l’intégration de plus de 500 amendements. Mais son principe réactionnaire est maintenu et revendiqué comme tel, tant par Valls que par Hollande.

Illustration - Un code du travail par établissement, c’est non

La droite, qui a la majorité au Sénat, a déjà annoncé qu’elle allait se faire un malin plaisir, non seulement de rétablir la version initiale du texte, mais d’y intégrer des articles encore plus propatronaux et antiouvriers, afin de plaire à son public. Au final, le texte reviendra à l’Assemblée nationale pour y être adopté, sauf surprise, au travers de la même procédure du 49.3, et avec ce que Hollande et le gouvernement auront décidé d’y mettre.

Au-delà même des remises en cause de droits existants, l’aspect le plus rétrograde de cette loi est la mise sur pied d’un code du travail spécifique non seulement à chaque entreprise, mais même à chaque établissement, si petit soit-il. Le patronat, les employeurs vont tenter ainsi de généraliser ce qu’ils cherchent à introduire depuis longtemps : la concurrence permanente entre travailleurs, la guerre de tous contre tous, en essayant de détruire toute idée d’intérêts collectifs au sein du monde du travail.

En effet la loi travail prévoit deux niveaux de droits des salariés dans les domaines aussi larges que la durée, la répartition et l’aménagement des horaires, les rémunérations, les heures supplémentaires, les congés, les jours fériés, les temps de pause, le travail de nuit… À chaque fois, le texte procède ainsi : tout d’abord, sous la rubrique « ordre public », il indique les droits minimum que la loi garantira, mais seulement en principe. Car après « ordre public », suit le chapitre « champ de la négociation collective », qui permet de remettre en cause tout ou partie de ce que le chapitre précédent avait présenté comme les droits minimum dont disposeraient les salariés.

Ainsi, si dans « ordre public » le taux des majorations d’heures supplémentaires est fixé à 25 %, cette majoration peut se réduire à 10 % dans « champ de la négociation collective ». De même, les jours fériés sont garantis payés dans la partie « ordre public » de la loi. Mais, sauf le 1er Mai, ils peuvent être remis en cause en tout ou partie par la voie d’un accord dans un établissement quelconque, même appartenant à une grande entreprise.

Voilà donc ce que la loi appelle, dans son titre, « refonder le droit du travail et donner plus de poids à la négociation collective ». Les accords d’entreprise ou d’établissement sont destinés à se substituer aux accords de branche, aux conventions collectives et à ce que la loi définit comme le minimum acceptable. Jusqu’à une période récente, en dehors du domaine limité des aménagements du temps de travail, la loi garantissait les mêmes droits minimum à tous les salariés. Avec le gouvernement Ayrault-Montebourg d’abord, puis avec Macron, les dérogations au Code du travail ont été élargies à d’autres domaines, au nom de la préservation de l’emploi. Avec la loi travail, on tend vers la généralisation de ce principe.

Bien sûr le patronat, et bien souvent le plus grand et le plus puissant, n’a pas attendu cette loi pour s’asseoir sur les droits prétendument garantis. Il reste que cette nouvelle loi représente un encouragement à renforcer l’attaque contre les travailleurs, leurs salaires, leurs congés, leurs conditions de travail… Lutter contre cette loi, c’est aussi contrer l’offensive des capitalistes et de leurs serviteurs politiques contre le monde du travail.

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