Bolloré : le « dernier empereur africain »20/04/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/04/2490.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Bolloré : le « dernier empereur africain »

Le siège du groupe Bolloré Africa Logistics en France a été perquisitionné le 8 avril dernier par les policiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales. Ils cherchent à savoir si le milliardaire breton a utilisé Havas – sixième groupe publicitaire mondial, détenu aujourd’hui à 60 % par son groupe et présidé depuis 2013 par son fils Yannick Bolloré – pour faciliter l’obtention de la gestion des ports de Conakry en Guinée et de Lomé au Togo.

C’est un certain Jean-Philippe Dorent, un des cadres dirigeants du groupe publicitaire, qui s’est occupé en 2010, pour le compte d’Havas (alors détenu à 32,9 % par Bolloré), de la campagne présidentielle guinéenne du candidat Alpha Condé. Le même Dorent a aussi eu la charge d’une partie de la communication de la campagne du président togolais, Faure Gnassingbé, fils de Gnassingbé Eyadema. Or, élu en novembre 2010, Alpha Condé a résilié dès le début du mois de mars 2011, par décret, la convention de concession du terminal à conteneurs du port de Conakry. Octroyée en 2008 pour une durée de vingt-cinq ans à Getma, filiale du groupe français Necotrans, elle a été confiée à son « ami » Vincent Bolloré. Au Togo, en 2010, l’année de la réélection de Gnassingbé, le groupe Bolloré a remporté la concession du terminal à conteneurs du port de Lomé pour une durée de trente-cinq ans. Cette décision a été, elle aussi, contestée, cette fois par Jacques Dupuydauby, un autre concurrent et ancien associé de Bolloré au Togo.

Bolloré a gagné en Afrique le surnom de dernier empereur africain. Il s’est construit depuis plusieurs années un véritable empire via sa filiale Bolloré Africa Logistics. Il y possède aujourd’hui les infrastructures de quinze ports, comme ceux d’Abidjan en Côte d’Ivoire, de Douala au Cameroun, de Conakry en Guinée, ou de Pointe-Noire au Congo Brazzaville.

Ce ne serait pas la première fois que Bolloré bénéficierait de quelques « facilités » dans la guerre menée contre ses concurrents pour récupérer des marchés. Il peut compter en effet sur ses réseaux d’affaires, ses relations avec les hauts fonctionnaires, les politiciens français de tout bord et… les dictateurs africains. Pour ne donner qu’un exemple, une information judiciaire pour trafic d’influence et corruption a été lancée en octobre 2014, à son encontre, le soupçonnant cette fois d’avoir bénéficié de concessions portuaires en Afrique grâce à une intervention de Sarkozy.

Alors, lorsque le dirigeant d’Havas déclare que « c’est un fantasme que de penser qu’un coup de main à la campagne d’un candidat à la présidentielle qui faisait figure d’outsider comme Alpha Condé permettrait l’obtention d’un port », il n’est pas convaincant, c’est le moins qu’on puisse dire.

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