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Charbonnages : le cancer de l’exploitation
834 mineurs de charbon de Lorraine ont porté plainte contre Charbonnages de France (CDF) pour préjudice d’anxiété. Ils accusent CDF de les avoir exposés à de multiples produits cancérogènes et toxiques sur leur lieu de travail, sans protection adéquate pour leur santé, et demandent en moyenne 30 000 euros d’indemnités.
Soutenus par la CFDT et FO, ils sont passés aux Prud’hommes en février 2015. Ceux-ci n’avaient pas tranché à l’époque, et c’est donc devant le juge départiteur que le procès vient de se dérouler fin mars à Forbach.
Comme en février 2015, Daniel Cadoux, l’ancien patron des Charbonnages, s’est montré d’un cynisme sans bornes. Il avait déclaré à l’époque : « Les mineurs ne meurent pas plus vite que les autres ouvriers. Ils meurent parce que ce sont des hommes et que l’homme est mortel. »
Devant le juge départiteur, il a récidivé face aux mineurs silicosés, amiantés, souffrant de cancers : « Pourquoi le pays devrait-il donner 30 000 euros à cette minorité de mineurs qui se déclarent anxieux ? Anxieux, on l’est tous. Ils n’ont aucune preuve de ce qu’ils avancent. Ils racontent, au final, n’importe quoi. » Autant dire que cela a encore soulevé un tollé dans la salle d’audience.
Il faut noter que cet ancien patron, ex-préfet, fut aussi le candidat investi par le PS aux législatives de 2012 dans la Côte-d’Or. Mais, après tout, détone-t-il vraiment avec les Valls, Macron El Khomri et autres ?
François Dosso, ancien délégué mineur du puits Vouters de Forbach, qui s’occupe de la question des maladies professionnelles à la CFDT, lui a répondu au tribunal, selon Le Républicain lorrain : « L’exposition est réelle. M. Cadoux dit : c’est bénin. Moi, les mineurs, je les vois tomber malades, je vois leurs yeux sans vie et leur bouteille à oxygène. Je les vois mourir. Je connais leur veuve. » Il a précisé que l’objectif de la plainte, outre les indemnités, est de « faire enfin reconnaître par la justice l’intoxication à grande échelle des mineurs et la faute de l’employeur. Cela doit permettre un meilleur suivi médical des anciens du charbon. Actuellement, ce suivi est insuffisant. Les mineurs doivent pouvoir passer des scanners, des examens approfondis afin de dépister et mieux soigner les cancers du poumon, de la gorge, de la vessie, du rein, du nez. »
L’avocat des mineurs a fourni des statistiques qui en disent long sur les risques encourus : « Sur les 800 demandeurs de la procédure, 77 ont développé une maladie depuis 2013, soit 10 %. Il y a dix cancers différents : bronchopulmonaire, leucémie, vessie, mélanome, rein… Sur les 800 demandeurs, 20 sont décédés depuis 2013, dont trois de maladies professionnelles reconnues. »
Les mines de charbon sont fermées depuis dix ans. Mais elles tuent toujours, dans une région aujourd’hui dévastée par le chômage. Les mineurs qui ont porté plainte ont toutes les raisons de vouloir faire reconnaître leurs droits.