Industrie pharmaceutique : les pilules aux œufs d’or23/03/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/03/2486.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Industrie pharmaceutique : les pilules aux œufs d’or

110 cancérologues et hématologues français ont publié le 15 mars, dans le journal Le Figaro, un appel dénonçant la hausse des prix des traitements contre le cancer. L’un des signataires, le professeur Vernant, dénonce « les profits indécents de l’industrie pharmaceutique ».

Celle-ci a développé ces dernières années toute une série de médicaments dits « innovants », qui représentent une réelle avancée thérapeutique dans la prise en charge des cancers mais aussi de l’hépatite C. Mais les prix très élevés de ces médicaments prennent une part de plus en plus importante (entre 8 et 9 % d’augmentation par an) dans les dépenses de santé puisqu’ils sont pris en charge par la collectivité.

Parmi ces médicaments « innovants », le Glivec des laboratoires Gilead, un médicament contre la leucémie myéloïde, coûte 3 000 euros par an en France et 7 500 aux USA. Dans la prise en charge de l’hépatite C, le même laboratoire propose aux USA le Sovaldi à 84 000 dollars pour un traitement de 12 semaines et l’Harvoni encore plus cher à 94 500 dollars… Les laboratoires justifient ces prix en disant qu’ils sont fixés en accord avec les autorités de santé. Mais c’est seulement la preuve de leur poids qui leur permet de « négocier » les prix qu’ils veulent.

Le professeur Vernant explique aussi que « l’industrie pharmaceutique détermine ses prix en fonction de ce que le marché est prêt à payer ». Et c’est d’autant plus choquant quand on sait que les mêmes médicaments peuvent être fabriqués pour quelques centaines de dollars dans certains pays du tiers-monde par des laboratoires locaux qui refusent le diktat des trusts américains ou européens.

Les laboratoires invoquent aussi les dépenses de recherche, les études cliniques, et leur budget Recherche et développement, pour justifier ces prix. Mais selon le professeur Vernant « moins de 15 % du chiffre d’affaires va dans la Recherche et le développement », quand la Ligue contre le cancer donne le chiffre de 30 % de dépenses de marketing dans le chiffre d’affaires d’un laboratoire.

Si les prix de ces médicaments sont astronomiques c’est tout simplement le résultat d’une politique cynique et délibérée de recherche du profit maximal que dénonçait déjà en décembre 2015 une enquête du Sénat américain en ces termes : « Depuis le départ, l’objectif premier de Gilead est de maximiser son profit, indépendamment des conséquences humaines. » L’enquête menée pendant 18 mois sur des documents internes du laboratoire a établi que Gilead était parfaitement conscient que le prix élevé de ses produits les mettait hors de portée de la majorité des patients. Que lui importe si le résultat est qu’aux USA seulement 2,4 % des 700 000 personnes victimes de l’hépatite C et couvertes par Medicaid ont pu bénéficier du traitement. Cela ne pèse pas lourd face aux 21 milliards de dollars engrangés par Gilead depuis le lancement de ses produits, rien qu’aux USA.

Pour les industriels de la pharmacie, recherche et progrès doivent d’abord rimer avec chiffre d’affaires et rentabilité, y compris aux dépens de la santé des malades et des finances des organismes de santé.

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