Guerre d’Algérie : pour réprimer, droite et gauche étaient complices23/03/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/03/2486.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Guerre d’Algérie : pour réprimer, droite et gauche étaient complices

La décision de François Hollande de commémorer l’anniversaire du 19 mars 1962, date du cessez-le-feu qui marqua la fin de la guerre d’Algérie, a déclenché une polémique bien hypocrite, notamment avec Nicolas Sarkozy.

Quand Sarkozy reproche aujourd’hui à Hollande d’avoir choisi une date qui marque le début de l’exode des Français d’Algérie et du massacre des harkis, les supplétifs de l’armée française, il ne fait que rappeler l’une des conséquences tragiques de cette guerre que ses prédécesseurs et ceux de Hollande menèrent à tour de rôle. Et quelle date aurait-il fallu choisir dans cette guerre où chaque jour était marqué par une empreinte de sang ? Pendant le long combat du peuple algérien pour son indépendance, la droite et les socialistes menèrent la répression d’un commun accord, se partageant la responsabilité de la mort de centaines de milliers d’Algériens, et de dizaines de milliers de jeunes soldats français.

C’est la gauche qui commença à intensifier la guerre. Lorsque la lutte armée commença à la Toussaint 1954, François Mitterrand, qui à l’époque n’était pas encore socialiste, mais ministre de l’Intérieur appartenant à un petit parti de droite, déclara à l’Assemblée « Tous les moyens seront réunis pour que la force de la nation l’emporte, quelles que puissent être les difficultés et les cruautés de cette tâche. » Ce fut le début d’une répression féroce. En mars 1956, le socialiste Guy Mollet se fit voter des pouvoirs spéciaux, avec l’appui du PCF. Il s’en servit pour rappeler en Algérie des jeunes du contingent et, l’année suivante, il confia le maintien de l’ordre à Alger au général Massu, couvrant ses actes de torture. À partir de mai 1958, lorsque de Gaulle fut appelé au pouvoir par Guy Mollet, la droite prit le relais de la gauche pour aggraver encore la répression, en Algérie mais aussi en France où la police massacra le 17 octobre 1961 plusieurs centaines de manifestants algériens dans les rues de Paris.

Face à cette complicité sans faille de la droite et de la gauche, la polémique entre Hollande et Sarkozy, cinquante-quatre ans après les faits, apparaît bien dérisoire. Après le cessez-le-feu, de nombreux harkis furent massacrés. L’armée française les avait recrutés pour l’aider dans sa sale guerre. Mais à la différence des parachutistes de Massu ou des troupes françaises, la majorité d’entre eux ne purent pas quitter l’Algérie, et restèrent face à la haine de ceux qu’ils avaient réprimés. C’est souvent le sort que les gouvernements des grandes puissances réservent, quand vient le moment de la défaite, à ceux qui leur ont servi de supplétifs. Quant aux 700 000 Français qui durent quitter l’Algérie, eux aussi furent victimes de cette politique qui avait dressé un mur de haine entre les populations française et arabe d’Algérie.

Hollande et Sarkozy peuvent bien se chamailler aujourd’hui sur une date de commémoration, cela est sans importance, et ne peut effacer la complicité de leurs prédécesseurs dans la guerre sanglante qu’ils menèrent en Algérie.

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