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Centrafrique : la Françafrique continue
Le second tour des élections présidentielles en République centrafricaine a porté au pouvoir Faustin-Archange Touadéra. Alors que les bandes armées continuent à terroriser la population à chaque coin de rue, François Hollande tenait absolument à ce que le scrutin ait lieu, afin de pouvoir déclarer que l’intervention militaire française se soldait par un succès.
Voilà maintenant le pays doté des attributs de ce que les représentants des grandes puissances appellent la démocratie : des élections, un président, et bientôt un gouvernement et un Parlement.
Faustin-Archange Touadéra n’est pas un nouveau venu. Il fut le dernier Premier ministre du dictateur François Bozizé, de 2008 à 2013, juste avant que celui-ci soit renversé par la rébellion Séléka. À ce titre, il fut complice du détournement des maigres richesses de la Centrafrique au profit de l’ex-dictateur, de sa famille et de son clan. Diamants, droits de douane, et jusqu’au programme d’aide de l’ONU, tout finissait dans les poches de Bozizé et de certains ministres du gouvernement dirigé par Touadéra.
L’adversaire de Touadéra pour la présidence n’avait pas des références plus reluisantes. Anicet-Georges Dologuélé avait été lui aussi Premier ministre dans le passé, avant de prendre la tête de la Banque des États d’Afrique centrale (BEAC). À ce titre, il avait lui-aussi participé au pillage de la Centrafrique pour le compte des pays impérialistes, au premier rang desquels la France. On pourrait en dire autant des principaux candidats du premier tour, avec lesquels la France entretient des liens étroits.
Touadéra prétend pouvoir sortir le pays du chaos et mettre en œuvre un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion des bandes armées. Mais de tels programmes, la Centrafrique en a connu, sans autre résultats que la reprise d’une rébellion quelques années plus tard. L’intégration de groupes armés rebelles dans l’armée régulière et les postes accordés à leurs chefs, que prévoient ces programmes, ont toujours fini par buter sur le fait que, dans un pays où l’État n’existe pas, ou plutôt se résume à la mangeoire d’un clan, il est toujours plus lucratif d’aller piller les richesses à la source, qu’il s’agisse de mines de diamants ou de tributs extorqués à la population.
Aujourd’hui, le gouvernement français a en grande partie sous-traité la présence militaire en Centrafrique aux 12 000 hommes de la Minusca, les troupes africaines agissant sous mandat de l’ONU. Il reste 900 soldats français, un chiffre que Hollande voudrait ramener à 300. Les uns comme les autres se comportent comme une bande armée parmi d’autres, comme le prouvent les accusations d’abus sexuels visant des soldats aussi bien français qu’africains
La comédie électorale qui vient d’avoir lieu, et tout le décorum prétendument démocratique qui l’entoure, ne changera rien au chaos qui règne en Centrafrique. Il est le fruit du pillage des richesses du pays par l’impérialisme français, pendant la période coloniale et après l’indépendance. Le fruit aussi de ses multiples interventions militaires pour soutenir des dictateurs prédateurs. Et quand Hollande promet à Touadéra « tout le soutien nécessaire », c’est de la continuation de cette politique qu’il parle.