Burundi : la population prise en otage24/02/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/02/2482.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Burundi : la population prise en otage

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a rencontré ce mardi 23 février, le président burundais Nkurunziza. À l’issue de son séjour dans la capitale Bujumbura, il a déclaré que celui-ci s’était déclaré prêt à un dialogue avec l’opposition, ce à quoi Nkurunziza a ajouté : « sauf ceux qui sont engagés dans des actes de déstabilisation », terme qui vise tous ceux qui n’acceptent pas sa dictature.

Pendant ces échanges de belles paroles, les massacres ont continué. Des grenades lancées par des hommes à moto ont à nouveau explosé dans la capitale, comme celles qui avaient fait une trentaine de blessés et tué un enfant le 15 janvier.

Depuis la candidature fin avril 2015 du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat, la violence n’a pas cessé. La police avait alors ouvert le feu sur les manifestations pacifiques d’opposants au dictateur corrompu. Des dizaines de milliers de Burundais se sont aussitôt enfuis dans les pays voisins, craignant pour leur vie. Des centaines de milliers d’autres les ont aujourd’hui rejoints. La répression s’est accentuée en mai après le coup d’État manqué du général Niyombare, l’ex-chef des services de renseignement. L’armée, la police, les milices de jeunes voyous du régime, les Imbonerakure, se sont abattues sur les quartiers qualifiés d’opposants, tirant les habitants hors de chez eux pour les assassiner.

En réponse à ces violences, des groupes rebelles armés se sont constitués et ont multiplié les attaques contre les hommes du régime, entraînant des représailles aveugles contre la population. Ainsi, en décembre 2015, l’attaque par les groupes rebelles de deux camps militaires a entraîné une répression sanglante dans les quartiers populaires de la capitale, faisant plus de cent morts. Et en janvier 2016 l’ONU a dénoncé l’existence de charniers contenant une centaines de cadavres et des viols collectifs commis par les forces armées dans les quartiers dont les hommes se sont enfuis ou ont été exécutés.

La population est prise en otage dans ces affrontements, dont les Burundais craignent qu’ils ne débouchent sur une guerre civile à connotation ethnique entre Hutu et Tutsi, semblable à celle qui avait ensanglanté le pays de 1993 à 2005. Alors que les premières manifestations n’avaient pas de caractère ethnique, les hommes qui s’accrochent au pouvoir font tout pour raviver cet antagonisme, autrefois entretenu par les colonisateurs belges pour asseoir leur domination. Cela avait causé des centaines de milliers de morts au Burundi après l’indépendance, comme ce fut le cas au Rwanda voisin avec la complicité de la France.

Face à cette situation dramatique, les grandes puissances et les pays africains se contentent de vagues déclarations. L’Union européenne, dont l’aide représente 20 % du budget burundais, discute depuis deux mois de la suspendre et en est encore à évoquer l’idée d’un gel des biens du président burundais et de ses proches. L’Union africaine et l’ONU essaient de convaincre Nkurunziza de dialoguer avec ses opposants et d’accepter une force africaine d’interposition. La France se félicite de la présence du contingent burundais en Centrafrique. Tous parlent des risques de génocide au Burundi, mais leur prétendue indignation ne va pas au-delà des mots.

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