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Dans le monde
Migrants : l’Europe des contrôles et des barbelés
Le 15 décembre, la Commission de Bruxelles a mis à l’ordre du jour la réforme de Frontex, une force d’intervention européenne pour la surveillance des frontières extérieures de l’Union.
Il y a dix ans, les gouvernements européens ont créé Frontex pour contrôler les entrées dans l’Union européenne. Leur propagande affirmait également que cela permettrait de sauver des vies humaines, celles des immigrés clandestins victimes des passeurs.
En 2015, plus d’un million et demi de migrants ont passé les frontières de l’Europe et des milliers sont morts en mer. L’afflux considérable de populations fuyant la guerre et la misère dans tout le Moyen-Orient, et au-delà, a démontré l’impuissance des gouvernements européens qui s’acharnent à transformer l’Europe en forteresse.
Selon le projet, il s’agirait de renforcer les effectifs de la nouvelle force d’intervention, qui compterait 1 000 agents permanents au lieu de 400 et 1 500 réservistes, des gardes-frontières et gardes-côtes nationaux mobilisables en deux ou trois jours. Cette mobilisation serait obligatoire pour les États concernés. Il serait question également de mettre encore plus à contribution les moyens techniques, comme les fichiers informatiques, pour mieux trier, ficher et renvoyer ces « migrants qui bougent d’un État à l’autre plus vite que les procédures », comme le déplore un diplomate. La nouvelle Frontex pourrait renvoyer directement les déboutés du droit d’asile. Bref, la Commission européenne propose d’investir… pour améliorer les remparts antipauvres.
À défaut de renvoyer immédiatement les migrants d’où ils viennent, les gouvernements des pays européens les plus riches veulent les cantonner aux limites de l’Europe. On y trouve, en particulier au sud, des pays plus pauvres et dépassés par la tâche, comme la Grèce, à qui les dirigeants européens ont ainsi récemment imposé de créer des centres d’enregistrement et de tri entre les « bons migrants » qui pourraient avoir droit à l’asile politique et les autres, les migrants « économiques », qu’il faudrait refouler.
L’espace européen de « libre circulation », selon les accords de Schengen, existe toujours officiellement. Mais en réalité les frontières n’ont jamais été aussi présentes. De la Pologne à l’Allemagne, de l’Allemagne à la France, de la France à l’Italie ou à l’Angleterre, d’un bout à l’autre de l’Europe des trains ou des camions sont contrôlés quand ils passent les frontières et la police en fait descendre les réfugiés. La Grèce a construit un mur face à la Turquie ; la Hongrie a le sien. Dans les Balkans, la Serbie, la Croatie, la Slovénie bloquent régulièrement l’entrée des migrants. La Macédoine a fermé sa frontière, ne laissant passer qu’un tout petit contingent d’émigrés syriens. Les autres réfugiés, épuisés et ulcérés, ont été récupérés par la police grecque et sont promis à l’expulsion.
Le nouveau dispositif proposé augmentera peut-être le nombre de gendarmes de l’Europe. Mais rien n’empêchera personne de fuir les persécutions et la misère créées par l’exploitation et par les guerres qu’entretiennent les grandes puissances. Cela ne fera qu’augmenter le nombre de victimes d’un système acharné à se débarrasser des pauvres.