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- Lutte ouvrière n°2464
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Editorial
Ils portent des coups aux travailleurs, les traitent de voyous : voilà leur dialogue social
Lundi19 octobre, Hollande et Valls ont ouvert la 4e « conférence sociale ». Ils ont déploré son boycott par la CGT. À l’occasion, ils ont rejoué la comédie du « dialogue social ». De qui se moquent-ils ?
Valls a traité de voyous les salariés d’Air France révoltés par les licenciements. Comme la droite et le Front national, le gouvernement a condamné ces salariés avant même qu’ils soient jugés. Comme lors de la fermeture d’ArcelorMittal à Florange et de l’usine PSA d’Aulnay-sous-Bois, il a choisi le camp du patronat, reprenant tous ses mensonges. Le gouvernement se dit partisan du dialogue mais, dans les actes, il cogne avec le patronat.
Aucun grand patron, aucun politicien pris la main dans le sac n’a été l’objet de l’acharnement médiatique qu’ont subi les salariés d’Air France. Aucun n’a été arrêté chez lui au petit matin par la police et traité en vulgaire criminel comme l’ont été les travailleurs d’Air France, qui seront jugés dans un mois pour « violence en réunion » parce qu’ils défendaient leur emploi. Le gouvernement, les médias et la justice donnent des leçons de dialogue aux travailleurs, mais ils débordent de mépris de classe et de hargne antiouvrière.
Ils sont tous très fiers du dernier accord sur les retraites complémentaires signé la semaine dernière entre la CFDT, la CFTC et la CGC, et le patronat. Voilà un modèle de dialogue social, nous disent-ils. Mais qui peut se réjouir de ce nouveau recul, si ce n’est le patronat ?
Avec cet accord, les complémentaires seront gelées encore des années. Mais surtout, à partir de 2019, un salarié qui a toutes ses annuités et l’âge requis pour partir à la retraite devra travailler un an de plus s’il ne veut pas voir sa complémentaire amputée de 10 %. Autrement dit, l’âge de départ pour la retraite complète est reculé à 63 ans, mais pour beaucoup ce sera 64, 65, 66 ans.
Le patronat ne mettra que symboliquement la main à la poche. La CGT et FO ont refusé de signer. Mais c’est, pour Hollande, une réussite du dialogue social. Puisque le salarié pourra « choisir » de travailler plus longtemps, ou de partir à 62 ans avec une retraite au rabais, il ose même parler de liberté ! Le gouvernement et le patronat sont passés maîtres dans l’art de transformer une attaque en liberté, un recul en progrès.
Le « dialogue social » vise à faire contresigner les coups patronaux par les directions syndicales. Mais elles n’ont à choisir que la sauce à laquelle les salariés seront mangés. Qu’est-ce que vous êtes prêts à sacrifier : vos conditions de travail ou votre salaire ? Votre temps de travail ou votre emploi ? Voilà comment se déroule le dialogue social.
Jamais il ne s’agit de mettre en balance les profits ou les dividendes versés aux actionnaires.
Le patronat n’a pas consulté les employés des grands magasins pour leur demander s’ils avaient besoin d’une augmentation de salaire. Il leur a dit : vous gagnerez un peu plus si vous travaillez le dimanche. Et aujourd’hui tous les médias nous expliquent que les salariés veulent travailler le dimanche ou en soirée !
Dans l’usine Smart de Hambach, la direction a organisé un référendum pour obtenir le retour aux 39 heures payées 37 et un blocage des salaires sur cinq ans, sans quoi elle menaçait de délocaliser la production en Slovénie.
Malgré ce chantage, 61 % des ouvriers ont voté contre, mais la direction a affiché 56 % de oui, ayant aussi fait voter les administratifs et les cadres. Pour déformer l’opinion ouvrière, tous ces gens sont très forts.
Le dialogue social, l’appel à la négociation et la multiplication des accords sont autant de façons de déguiser la dictature patronale. C’est une mascarade consistant à faire croire que les coups patronaux sont acceptés par les salariés.
Gattaz et ses acolytes du grand patronat veulent s’attaquer aux droits des travailleurs. Et le gouvernement leur est dévoué corps et âme, il le montre depuis des années. Pour les servir, il est prêt à sacrifier les services publics, à démolir les retraites, le Code du travail et les droits des chômeurs. Sous couvert de dialogue social, le gouvernement et le patronat mènent la lutte de classe contre les travailleurs.
La première des choses pour les travailleurs est de prendre la parole eux-mêmes, de ne pas laisser le gouvernement ou le patronat parler à leur place pour leur faire dire le contraire de ce qu’ils pensent. C’est de s’organiser et de se mobiliser le plus collectivement possible pour peser car, dans cette lutte de classe, on ne peut pas rester sans rendre les coups.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 19 octobre 2015