Le patronat montre les dents17/06/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/06/2446.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le patronat montre les dents

Dans leurs attaques répétées contre le Code du travail, les représentants du patronat invoquent toujours le même argument. Ce texte serait trop long, trop complexe, trop obscur. Ils rêvent probablement de le remplacer par le règlement originel, instauré en 1791 par la bourgeoisie récemment arrivée au pouvoir, la loi Le Chapelier. Ce texte stipulait que « chaque homme est libre de travailler là où il le désire et chaque employeur libre d’embaucher qui lui plaît grâce à la conclusion d’un contrat dont le contenu est librement déterminé par les intéressés ».

Il ne fallut pas longtemps pour que les premiers militants ouvriers dénoncent cette prétendue égalité entre celui qui doit trouver un emploi ou mourir de faim et celui qui possède les moyens de production, entre la majorité qui n’a rien et la minorité qui possède tout. Cette liberté dans les relations entre le travailleur salarié et le capitaliste, Marx l’appelait la liberté du renard libre dans le poulailler libre.

La classe ouvrière entama donc, dès sa naissance, une lutte collective pour affirmer son droit à la vie. Le résultat, chèrement acquis puisqu’il y fallut des grèves, des insurrections et des menaces de révolution, des trésors de ténacité, de dévouement et d’organisation, fut la reconnaissance de droits collectifs. Là où la bourgeoisie ne voulait voir que des individus isolés, désemparés, poussés par le besoin, les travailleurs firent apparaître une classe sociale, avec ses droits, ses exigences et ses protections. Là où le patronat voulait l’exploitation sans limite, la classe ouvrière dressait des barrières et contraignait même l’État à les légaliser. Interdiction du travail des enfants, limitation de la journée de travail, salaire minimum, assurances, sécurité, conditions d’embauche et de licenciement, tout fut conquis de haute lutte avant d’être inscrit dans la loi. Il y entra en même temps, ainsi que dans l’expérience des générations, la conscience collective des exploités. Chaque grande période de lutte de la classe ouvrière, au début du XXe siècle, en 1936, en 1968, trouva ainsi sa transcription dans le Code du travail.

C’est là-dessus que le patronat veut revenir. Il veut ôter les freins à l’exploitation. Il veut détruire les règlements, bien sûr, mais il veut aussi détruire la notion de contrat collectif, d’intérêt collectif des travailleurs.

Symétriquement, les travailleurs, en s’opposant aux attaques patronales contre le Code du travail, défendent plus que leurs conditions de vie et que les protections légales. Ces dernières, d’ailleurs, ne s’appliquent plus à tous depuis longtemps et sont abolies pour les précaires, les sans-papiers, les petits boulots, les autoentrepreneurs, etc. Dans le Code du travail, les travailleurs ont à défendre précisément ce que les patrons et tous leurs porte-voix veulent étouffer : la conscience collective, celle d’être une classe sociale, opprimée certes, mais combattante et porteuse de l’avenir de toute la société.

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