Cuba : Hollande flaire les affaires12/05/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/05/2441.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Cuba : Hollande flaire les affaires

Après les Antilles, François Hollande s’est rendu à Cuba, pays où un président français n’avait pas mis les pieds depuis un siècle. Maintenant que les États-Unis révisent leurs relations avec un peuple qui pendant cinquante-cinq ans leur a tenu tête et qu’une ouverture économique se profile, l’impérialisme français estime avoir le feu vert de Washington pour y proposer ses produits, un retour d’ascenseur pour ses bons et loyaux services en Afrique et au Moyen-Orient. Cinq ministres et vingt patrons accompagnaient donc le président.

La lutte du peuple cubain pour s’affranchir de la tutelle de l’impérialisme américain, qui avait transformé La Havane en une sorte de lupanar où régnait la mafia, a toujours laissé indifférents les dirigeants français, le Parti socialiste comme de Gaulle. En 1959, quand la révolution cubaine l’emporta, la puissance coloniale française cherchait surtout à sortir au mieux du bourbier de la guerre d’Algérie.

Ensuite, les dirigeants français ont laissé faire les États-Unis, qui ont mené la vie dure à Cuba, menaçant la vie des dirigeants castristes, tentant d’y reprendre la main par la force, ou imposant un blocus, aggravé après 1989 par la fin du partenariat Cuba-URSS qui en atténuait les effets. Aujourd’hui encore, la vie quotidienne des Cubains est difficile du fait des multiples pénuries.

Les entreprises françaises étaient un peu moins indifférentes. En 1993, le groupe Pernod-Ricard a mis un pied sur l’île en rachetant le fabricant de rhum Havana Club. Et la BNP a été mise à l’amende par Washington pour avoir violé l’embargo, dont les entreprises françaises attendent maintenant la levée. Lundi 11 mai devant la jeunesse cubaine, Hollande s’est donc fait leur porte-parole en réclamant sa fin.

Même si la population cubaine reste défiante vis-à-vis des États-Unis, elle espère que la fin du blocus et l’ouverture seront bénéfiques. Mais elle pourrait être déçue. Le monde capitaliste ne s’intéresse pas aux progrès dus à la révolution, par exemple au fait que Cuba dépense le sixième de ses ressources annuelles pour l’éducation. Les entreprises françaises, comme d’autres, entendent prendre « toute leur place dans le développement économique de l’île ». Et c’est bien le problème. L’ouverture aux prédateurs impérialistes pourrait se révéler désastreuse pour la population.

Pour atténuer les critiques de ceux qui pourraient lui reprocher d’établir des relations avec un pays accusé de ne pas respecter les droits de l’homme – mais qui les respecte ? – Hollande a fait commandeur de la Légion d’honneur le cardinal Ortega qui, avec le pape, a servi d’intermédiaire entre Cuba et Washington, mais aussi entre le régime et les prisonniers politiques de l’île. Ce n’est pas en Arabie saoudite, pays connu pour son mépris des droits humains, que Hollande a visité une semaine auparavant, qu’il aurait osé faire un tel geste vis-à-vis des opposants.

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