Tunisie : après l’attentat meurtrier au musée du Bardo25/03/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/03/2434.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Tunisie : après l’attentat meurtrier au musée du Bardo

Deux groupes djihadistes, Ansar al-Charia lié à AQMI (al-Qaïda au Maghreb islamique) et EI (l’organisation État islamique), ont revendiqué la tuerie organisée le 18 mars au musée du Bardo, à Tunis. Les 21 morts et les 47 blessés, majoritairement des touristes débarquant de navires de croisière, ont été victimes pendant plusieurs heures d’une chasse à l’homme dans le bâtiment, après l’attaque à la kalachnikov de bus transportant les visiteurs.

Des responsables de la sécurité ont depuis été limogés, dont le chef de la police de Tunis et celui du Bardo. Dans un discours récent, le président tunisien Caïd Essebsi a d’ailleurs déploré des négligences sur la sécurité mise en œuvre dans de tels lieux touristiques, dans un quartier central de la capitale, à deux pas du Parlement. Mais cela n’explique évidemment pas tout.

Cet acte barbare a été perpétré quelques semaines après un précédent attentat organisé à Boulaâla, non loin de Kasserine, dans lequel quatre agents de la Garde nationale ont été tués. L’un comme l’autre sont l’œuvre de tueurs affiliés à l’une des mouvances qui se réclament des bandes djihadistes opérant surtout au Moyen-Orient. Visant cette fois le centre-ville, et s’attaquant à des civils, particulièrement des touristes, les tueurs s’en sont pris au secteur économique, le tourisme, qui procure un emploi sur dix dans le pays. Deux croisiéristes italiens, MSC croisières et Costa croisières, ont d’ailleurs aussitôt annoncé qu’ils suspendaient leurs escales à Tunis.

L’objectif des tueurs n’était pas le « modèle de transition démocratique » dont ont aussitôt parlé politiciens et médias à propos de la Tunisie. Ils voulaient démontrer leur capacité à frapper en plein cœur de Tunis et à compromettre une des activités économiques importantes du pays, en décourageant les nombreux touristes occidentaux qui visitent la Tunisie.

Les groupes djihadistes s’étaient jusqu’à présent manifestés dans les montagnes de l’ouest et dans la région pauvre du sud-est du pays. Des centaines de leurs membres, voire plus, seraient de retour après un entraînement en Libye. Mais ils ne surgissent pas du néant : trois ans de gouvernement sous l’influence du parti islamiste Ennahda, entre 2011 et 2013, ont laissé se développer et même favorisé les agissements des salafistes, puis des djihadistes. Sa propagande réactionnaire, son laxisme vis-à-vis des islamistes les plus radicaux, ont encouragé l’assassinat de militants de gauche, Chokri Belaïd puis Mohamed Brahmi, les attaques contre les femmes, les ouvriers en grève, les étudiants, les artistes…

Quant aux revendications populaires exprimées lors de la chute de Ben Ali, elles restent insatisfaites. La pauvreté persistante de certaines régions, les effets de la crise économique, le chômage qui atteint la moitié des jeunes ont aggravé le désespoir d’une partie d’entre eux. Et un recruteur djihadiste offrirait 600 à 1 000 dollars par mois…

La barbarie djihadiste qui s’étend n’est que le reflet hideux de celle des grandes puissances, qui dressent les populations les unes contre les autres, manipulent les dictateurs et les milices, les arment, bombardent et continuent de régner sur les puits de pétrole.

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