Grande-Bretagne : Crise et salaire minimum11/02/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/02/2428.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne : Crise et salaire minimum

Selon l'Office de statistiques britannique, le pouvoir d'achat du salaire horaire moyen a encore baissé de 1,6 % en 2014, pour la sixième année consécutive. Au total, la baisse du salaire horaire réel moyen est de près de 10 % depuis le début de la crise - ce qui équivaut à un retour de quinze ans en arrière, au niveau de l'année 2000.

Cette baisse est due en partie au remplacement de nombre d'emplois permanents par des emplois précaires mal payés et au gel pratiquement total des salaires dans le secteur public. Mais elle est également due au rôle du salaire minimum qui, de filet de sécurité très relatif qu'il était censé être lors de son introduction par le gouvernement travailliste de Tony Blair en 1999, en est venu à tirer vers le bas l'ensemble des salaires.

Ce salaire minimum a toujours été bas par rapport à la France. Mais, en plus, son pouvoir d'achat a été rapidement érodé par le fait qu'il a toujours été réévalué - quand il l'était - en fonction d'un indice des prix absurde qui ne prend pas en compte les frais de logement, justement ceux qui grèvent le budget des foyers ouvriers !

Aujourd'hui, ce salaire minimum s'établit à 8 euros de l'heure pour les travailleurs de 21 ans et plus, et 6,25 euros de l'heure pour les 18 à 20 ans - soit un salaire mensuel, pour un temps plein, de 1 317 euros et 1 030 euros respectivement. Mais il y a aussi le million de prétendus « apprentis » : 40 % d'entre eux ont entre 25 et 45 ans et 10 % ont plus de 45 ans (et parfois beaucoup plus). Autant dire que ces « apprentis » sont là pour servir de main-d'oeuvre à très bon marché, avec un salaire minimum à temps plein de 550 euros par mois !

Or, à Londres, on ne trouve pas de chambre en colocation à moins de 1 200 euros par mois, sans parler du prix des appartements ! Impossible donc de se loger, à moins d'aller se perdre dans une banlieue lointaine. Mais alors se pose le problème du coût exorbitant des transports en commun qui ne sont jamais pris en charge par le patronat. Autant dire que c'est la quadrature du cercle, surtout pour les millions de travailleurs qui n'ont qu'un emploi à temps partiel pour survivre, voire seulement quelques heures par semaine.

Mais l'aspect le plus hypocrite de ce salaire minimum, c'est qu'aucun mécanisme n'est réellement prévu pour le faire appliquer. Théoriquement, comme les impôts sont prélevés sur la paye, ce sont les impôts qui sont chargés de cette tâche. Mais si ces services n'oublient jamais de prélever les impôts, en revanche ils ne regardent que d'un oeil très distrait le taux horaire appliqué.

C'est ce que montre le fait que, depuis l'arrivée de Cameron au pouvoir en 2010, seules deux entreprises ont été poursuivies pour infraction à la loi sur le salaire minimum, et aucune en 2014 ! Mais il faut dire que les Travaillistes n'avaient guère fait mieux puisqu'au cours des onze années où ils avaient présidé à la mise en oeuvre du salaire minimum, seules sept entreprises avaient été l'objet de poursuites.

Les patrons britanniques seraient-ils si respectueux des lois ? Bien sûr que non. En mai 2014, l'Office des statistiques estimait très officiellement que 236 000 travailleurs étaient payés en-dessous du salaire minimum bien qu'étant légalement employés. C'est tout dire.

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