MyFerryLink, Calais : Les salariés face à la tourmente capitaliste14/01/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/01/2424.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

MyFerryLink, Calais : Les salariés face à la tourmente capitaliste

Les 600 salariés de la compagnie MyFerryLink qui assure la traversée Calais-Douvres se retrouvent à nouveau menacés de perdre leur emploi. En effet le tribunal d'appel anglais a confirmé le jugement de l'Autorité britannique de la concurrence, la CMA, qui en juin dernier avait décidé l'interdiction aux ferries de MyFerryLink d'accoster à Douvres. C'est un épisode de plus dans le feuilleton juridique qui dure depuis près de trois ans et qui s'inscrit dans la guerre commerciale menée par les compagnies rivales opérant sur la Manche.

MyFerryLink est une société coopérative et participative (scop) créée il y a deux ans, après que l'État français a coulé SeaFrance, qui appartenait à la SNCF, avec ses mille salariés. Eurotunnel a racheté les trois ferries de Seafrance et les loue à la scop. Mais l'Autorité britannique de la concurrence a considèré que le poids de l'ensemble Eurotunnel-MyFerryLink serait trop important en dépassant 50 % du trafic transmanche. Cela arrangeait bien les affaires des compagnies concurrentes P&O et DFDS. Et c'est dans le sens de leurs intérêts que vient de trancher le tribunal anglais, contre ceux d'Eurotunnel.

Les travailleurs de MyFerryLink n'admettent pas cette décision et lancent un nouveau recours juridique. Le gouvernement Hollande, par le biais du secrétaire d'État chargé des Transports, a dit regretter une décision « profondément injuste ». Le député PS de Calais, Yann Capet, a protesté contre une « atteinte inqualifiable à la souveraineté et à l'autorité de la chose jugée en France ». La maire et sénatrice UMP de Calais, Natacha Bouchart, a dit déplorer « l'absence du gouvernement français sur le dossier ». Un beau concert d'hypocrisie, alors que c'est l'État français, sous la responsabilité de l'UMP et du PS, qui a sabordé Seafrance et qui a licencié !

Les politiciens locaux et nationaux avaient présenté Eurotunnel, parce qu'il louait ses navires à la scop, comme le bienfaiteur des salariés. Mais la seule chose qui l'intéressait était, en cumulant le transport sous et sur l'eau, d'augmenter ses parts de marché. Maintenant, Eurotunnel dit chercher à vendre ses navires. Mais un repreneur va-t-il se présenter, et à quelles conditions pour les salariés ? Ce sont pour eux encore des mois d'incertitude en perspective.

Ces mêmes politiciens avancent continuellement les arguments nationalistes, prétendant défendre les salariés français d'une compagnie française en lutte contre des compagnies étrangères. Mais ce ne sont pas des intérêts nationaux qui sont en jeu, ce sont ceux des travailleurs, quelle que soit leur nationalité. Si MyFerryLink emploie 533 travailleurs en France, ils sont aussi 71 en Angleterre. La compagnie anglaise P&O emploie également de nombreux salariés français. Quant à DFDS, la compagnie danoise qui avait sollicité la CMA, elle compte près de 300 ex-salariés de Seafrance. Et au cas où l'interdiction de naviguer de MyFerryLink n'aurait pas été confirmée, DFDS menaçait même de licencier ses propres employés pour faire pression sur les autorités anglaises !

Les salariés du transmanche, qu'ils soient anglais, français ou autre, et quelle que soit la compagnie qui les embauche, ont des intérêts communs. C'est de leur union contre les patrons qui les exploitent et les licencient, dans une lutte déterminée, que viendra leur capacité à se défendre pour ne pas faire les frais de la concurrence capitaliste.

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