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- Lutte ouvrière n°2417
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Italie : Eternit, le crime de l'amiante déclaré prescrit !
Le 19 novembre, la Cour de cassation italienne a annulé la sentence infligée au dirigeant de la société Eternit, le suisse Stephan Schmidheiny, pour le désastre environnemental causé par l'amiante.
La raison est que selon la loi ce délit est prescrit au bout de douze ans, un délai à considérer depuis l'année 1986, année de la faillite de la société Eternit qui gérait l'usine de Casale Monferrato, dans la région turinoise.
Cette décision scandaleuse a été accueillie avec indignation par les victimes et leurs proches, dont certains ont crié « injustice est faite ». Car évidemment aucune prescription ne couvre les conséquences dramatiques de l'utilisation de l'amiante dans cette usine. Près de trente ans après, les fibres qui infestaient tout le voisinage continuent de tuer à petit feu d'anciens ouvriers, tout comme de simples habitants de Casale et des environs. La justice, en revanche, a été suffisamment lente pour que maintenant le délit soit prescrit.
Suite à l'annulation de la sentence, toutes les demandes d'indemnisation sont bloquées, qu'elles émanent des victimes, de la Sécurité sociale ou de la caisse des accidents du travail italienne. Schmidheiny, qui vit tranquillement en Suisse, n'est pas blanchi puisque la Cour de cassation ne nie pas sa culpabilité et donc sa responsabilité dans la mort de milliers de personnes, mais la prescription fait qu'il ne doit rien à personne. Il se paye même le luxe d'accuser le tribunal de Turin, qui l'a condamné, d'avoir bafoué ses droits.
L'affaire n'est cependant pas close car le juge Guariniello de Turin, qui avait instruit l'affaire et dont la ténacité avait permis la condamnation d'Eternit, avait eu la prudencs d'engager deux procédures. Si le délit de désastre environnemental est prescrit, il n'en est pas de même du délit d'homicide, dont Schmidheiny est accusé dans la seconde procédure qui pourrait concerner plus de deux mille personnes mortes de cancer suite à l'inhalation d'amiante à Casale.
Cette seconde procédure est donc toujours en cours, mais l'ex-dirigeant d'Eternit, après l'annulation de sa première condamnation, espère visiblement en éviter une deuxième. Il a écrit qu'il attend de l'État italien « qu'il le protège d'autres procès injustifiés et archive toutes les procédures en cours ». Il trouvera certainement pour cela des oreilles complaisantes et payera sûrement assez d'avocats pour faire encore durer les procès. Mais les victimes et leurs proches, eux, sont bien décidés à poursuivre le combat pour faire reconnaître sa responsabilité, et celle des capitalistes de son espèce, dans la tragédie de l'amiante.