Mélenchon : D'une mauvaise boussole à l'autre29/10/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/10/une2413.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Mélenchon : D'une mauvaise boussole à l'autre

Jean-Luc Mélenchon vient de sortir son livre intitulé L'Ère du peuple. Une façon de prendre ses distances avec le mot de « gauche. » Mais s'il est vrai que celui-ci ne permet pas vraiment de s'orienter en politique, se réclamer du « peuple » est tout aussi flou.

Sénateur socialiste durant vingt-deux ans, Mélenchon ne prend pas de distance avec son passé. Il encense même l'oeuvre « unique au monde » du gouvernement Jospin, de 1997 à 2002, dont il fut ministre. Oubliés, les licenciements de Renault à Vilvorde, qui donnèrent, dès le début, l'orientation antiouvrière du gouvernement socialiste de l'époque. Oubliée, la flexibilité des horaires de travail incluse dans la loi dite des « 35 heures » et les privatisations, plus nombreuses même que sous les gouvernements de droite qui avaient précédé. À en croire Mélenchon, tout le mal serait apparu avec Hollande, qui « occupe dès 1983 une place bien à droite, à contresens de la tradition française du socialisme ». Mélenchon se flatte d'avoir très tôt percé à jour le futur président. S'il a appelé à voter pour lui au deuxième tour de la présidentielle de 2012, c'est qu'il croyait « qu'il resterait quelque chose de bon et que ce serait toujours ça de pris. C'était une erreur. » Malgré tout, il ne voit pas ce qu'il aurait pu faire d'autre.

Aujourd'hui, la politique de Hollande ayant déconsidéré le mot de « gauche » jusqu'à le tuer, il ne resterait plus qu'à prendre ses distances et à rassembler le « peuple » autour d'un projet de VIe République. « C'est le peuple qui prend la place qu'occupait hier la "classe ouvrière révolutionnaire" dans le projet de la gauche », écrit Mélenchon. Faut-il comprendre de ce galimatias que la classe ouvrière, déçue par la gauche, devrait se jeter dans les bras d'un ex-socialiste parce qu'il parle au nom du « peuple » ?

Ce langage n'est pas entièrement nouveau. Le PCF parle depuis longtemps de « peuple de gauche ». Entre le « redonner espoir à la gauche » clamé par le PCF et le « front du peuple » de Mélenchon, c'est un concours de mots creux entre dirigeants frustrés de la seule perspective qu'ils aient jamais eue, celle d'aller au gouvernement dans le cadre du système. Et faire oublier que la vraie division de la société est celle qui sépare exploiteurs et exploités, c'est aussi une façon de désorienter ces derniers.

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