Moyen-Orient : La coalition contre l'« État islamique », une nouvelle guerre impérialiste !01/10/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/10/une2409.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Moyen-Orient : La coalition contre l'« État islamique », une nouvelle guerre impérialiste !

Les dirigeants impérialistes, États-Unis en tête, ont engagé une nouvelle guerre au Moyen-Orient. Après le début des bombardements, le 8 août en Irak, puis le 22 septembre en Syrie, Obama est parvenu à rassembler près d'une cinquantaine d'États dans une coalition militaire contre l'avancée des bandes armées du prétendu « État islamique ».

Revenant sur ses promesses de retrait d'Irak et d'Afghanistan, Obama présente maintenant les USA comme « le leader mondial dans la lutte pour affaiblir et finalement détruire le groupe terroriste connu sous le nom d'EI ». Pour sceller les participants à cette nouvelle version de la croisade contre le « terrorisme », Washington a fait voter par le Conseil de sécurité une résolution les engageant à lutter contre l'encouragement et le financement du « djihad ». Car les dirigeants américains savent parfaitement que nombre d'États, en Orient comme en Occident, n'ont cessé de fournir armes et dollars à des milices combattant un ami de leur ennemi du moment, jusqu'à ce que celles-ci échappent à tout contrôle.

Derrière les dirigeants des États-Unis, de la France, et de treize autres États occidentaux, dont la Grande-Bretagne, se sont finalement regroupés ceux de six dictatures arabes : l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, aux dires du Pentagone, auraient bombardé des raffineries contrôlées par EI. Il s'y ajoute Bahrein, la Jordanie, le Qatar et le Koweit qui auraient ouvert leurs bases aux avions US ou auraient prévu de faciliter les opérations militaires américaines.

Non seulement les puissances impérialistes ont jeté les bases explosives des conflits qui ont dressé les uns contre les autres les peuples du Moyen-Orient, mais ils ont encouragé, formé les groupes armés dont ils espéraient se servir dans leur jeu politique régional. Ils sont au premier chef responsables de l'éclatement de l'Irak et de sa désagrégation en territoires dominés par de multiples bandes armées rivales, dont certaines ont renforcé l'EI. Les grands brigands s'appuient sur de plus petits, comme l'Arabie saoudite et le Qatar, qui sont de notoriété publique parmi les pourvoyeurs financiers des groupes armés « djihadistes ».

L'objectif avancé est de lutter contre les méthodes barbares de l'EI. Mais il suffit de se rappeler la façon dont les droits des femmes, des ouvriers immigrés, des opposants sont bafoués par ces régimes, comment en Arabie saoudite on procède aux décapitations publiques au sabre, pour savoir que les « djihadistes » n'ont rien inventé.

Nouvellement ralliée à la croisade, la Turquie s'est jointe au concert des hypocrites, après la libération, le 20 septembre, des otages turcs détenus pendant trois mois à Mossoul par un groupe de l'EI. Selon le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan, la Turquie ne peut « rester en dehors de la coalition » et ouvrira sans doute aux coalisés l'usage de sa base militaire d'Incirlik, en échange d'une aide à la prise en charge du million et demi de réfugiés syriens déjà établis dans le sud est du pays, et dont l'afflux continue.

Erdogan et son gouvernement affichent un ralliement qui couvre bien des calculs. Le pouvoir turc a hébergé et fait transiter sur son sol nombre de candidats au « djihad » en route vers la Syrie, où ils pouvaient déstabiliser le régime de son rival Assad. Mais maintenant il se trouve face à un renforcement des positions des Kurdes d'Irak et de Syrie, les seuls à affronter militairement sur le terrain les « djihadistes » de l'EI. Son souci, au moins autant que de combattre l'EI comme les États-Unis le lui demandent, est d'empêcher le pouvoir kurde autonome de prendre trop de poids.

Voilà donc quelle coalition s'est constituée autour des États-Unis. Son objectif affiché est de combattre le pouvoir de l'EI en Irak et en Syrie, et sa barbarie. Mais ce pouvoir de l'EI est lui-même le produit - barbarie comprise - de la politique des grandes puissances et de leurs alliés locaux. Dans la nouvelle alliance constituée, aucun de ceux-ci n'abandonnera son double ou son triple jeu. L'Arabie saoudite, la Turquie, le Qatar poursuivent leurs propres objectifs contre le pouvoir d'Assad en Syrie, contre l'Iran et contre l'Irak, tandis que les États-Unis et leurs alliés occidentaux ne cherchent qu'à se servir d'eux pour tenter de rétablir un équilibre permettant au moins de garantir l'exploitation des ressources pétrolières. Si demain l'EI est vaincu, qui peut dire quel nouveau pouvoir émergera à sa place, encouragé et financé par quelles puissances, et avec quel degré de barbarie ?

Les peuples d'Irak, de Syrie et de tout le Moyen-Orient n'ont pas fini de payer les conséquences du chaos dans lequel les interventions des puissances impérialistes ont plongé la région.

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