Grande-Bretagne : Cameron s'en va-t-en guerre01/10/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/10/une2409.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne : Cameron s'en va-t-en guerre

Le 26 septembre, le Parlement britannique a formellement voté la participation de la Grande-Bretagne à la coalition internationale formée par Obama contre les milices islamistes d'EIIL, appelé désormais simplement EI (État islamique). Pour l'instant, six bombardiers Tornado de la RAF basés à Chypre iront bombarder leurs forces au nord de l'Irak, les mêmes qui, depuis des semaines, y effectuaient déjà des vols de reconnaissance quotidiens.

À sept mois des élections où se jouera le sort du gouvernement Cameron, celui-ci n'avait pas voulu prendre le risque de se passer de l'assentiment du Parlement comme l'avait fait Blair en 2003. Mais le souvenir du fiasco du 29 août 2013, lorsque le Parlement avait refusé de donner son autorisation à une intervention britannique en Syrie, l'avait rendu prudent.

C'est ainsi que la convocation du Parlement en séance extraordinaire a été précédée par une campagne sur les exécutions d'otages auxquelles s'est livré l'EI, dont celle de David Haines, un Anglais qui travaillait pour une ONG en Irak. Et pour accréditer la ligne officielle selon laquelle EI constitue une « menace immédiate » pour la Grande-Bretagne, la presse a donné la vedette à celui qu'elle a surnommé « Jihadi John », un milicien s'exprimant avec un fort accent londonien sur l'une des vidéos diffusées par EI.

Pour faire bonne mesure, Cameron a également invoqué l'appel à l'aide militaire internationale lancé par le nouveau Premier ministre irakien, Haider al-Abadi. Mais il s'est bien gardé de rappeler comment Abadi était revenu en Irak en 2003 dans les fourgons de l'armée britannique. Il avait auparavant animé l'une des factions du parti religieux chiite al-Dawa, à Londres, pendant deux décennies, avec la bénédiction des services secrets anglais.

Cette fois-ci, Cameron a recherché un consensus avant le vote du Parlement, en négociant les termes de sa motion avec l'opposition travailliste. Du coup, oubliant son opposition à la guerre en Irak du temps de Tony Blair, le leader travailliste Ed Miliband s'est rallié à la motion gouvernementale.

Sans doute cette motion est-elle restrictive, dans la mesure où elle exclut toute participation anglaise aux opérations américaines en Syrie sans une autorisation du Parlement, ainsi que l'envoi de « forces combattantes » sur le terrain en Irak. Néanmoins, elle n'exclut pas l'envoi de forces spéciales à des fins de « renseignements ou d'entraînement » - ce qui, comme l'a remarqué un ancien chef d'état-major de l'armée britannique, ouvre la porte à bien des interprétations.

Au final, 524 députés ont voté la motion gouvernementale, 43 ont voté contre - dont 24 travaillistes et six conservateurs - et 69 se sont abstenus. Ce n'est pas vraiment l'unanimité que souhaitait Cameron, mais c'est une majorité suffisante pour légitimer sa nouvelle « guerre contre la terreur ».

Onze ans après l'invasion de 2003, voici donc l'armée britannique repartie dans une nouvelle guerre en Irak. Et pour limité que paraisse son engagement - échéances électorales obligent - les leaders politiques cherchent déjà à habituer l'opinion à l'idée qu'il risque de durer des années et de nécessiter bien d'autres moyens pour aboutir à ses objectifs.

Pour l'instant, les protestations contre cette nouvelle intervention au Moyen-Orient ont été très limitées. Il n'y a là rien de comparable aux centaines de milliers de manifestants qui étaient descendus dans les rues à la veille de l'invasion de 2003, mais cela peut changer. En tout cas les travailleurs n'ont à soutenir sous aucun prétexte ce qui est le début d'une nouvelle aventure militaire de l'impérialisme britannique.

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