Écosse : Le pouvoir de Londres censuré par référendum24/09/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/09/une2408.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Écosse : Le pouvoir de Londres censuré par référendum

Les électeurs écossais ont finalement repoussé l'indépendance qui leur était proposée lors du référendum du 18 septembre. 55,3 % d'entre eux ont voté « non » contre 44,7 % de « oui ».

On ne verra donc pas s'ériger de frontière le long du mur construit il y a 1 892 ans par l'empereur romain Hadrien pour protéger son empire des incursions des clans écossais. Et, en dehors des nationalistes les plus enragés, personne ne le regrettera. Mais il est vrai que, même si le « oui » l'avait emporté, cette frontière serait de toute façon probablement restée virtuelle, tant est grande l'intégration de l'économie écossaise et de l'économie anglaise.

Quoi qu'il en soit, ce référendum présente deux faits bien plus significatifs. Le premier est la mobilisation qu'il a provoquée dans l'électorat : 97 % des électeurs potentiels s'étaient inscrits sur les registres électoraux et 84,6 % de ceux-ci ont participé au vote. Or, depuis les années 1990, le taux d'inscription aux registres électoraux est estimé à moins de 80 % et l'abstention oscille entre 35 et 55 % des inscrits. C'est dire la réelle volonté des électeurs écossais d'utiliser leur bulletin de vote pour s'exprimer.

Le deuxième fait significatif est que les quatre comtés où le « oui » a été majoritaire incluent la ville de Glasgow et sa banlieue populaire, ainsi que la ville de Dundee. Or, non seulement ces comtés représentent près d'un quart de l'électorat écossais, mais ils recouvrent les deux principales concentrations ouvrières d'Écosse et celles qui ont été le plus touchées par la crise.

Dans un sondage effectué au lendemain du vote, une très large majorité de ceux qui avaient voté « oui » ont indiqué que leur principal motif avait été d'exprimer leur mécontentement face à la politique des partis qui dirigent les institutions britanniques à Londres. Et tout indique que c'est bien plus cette motivation - tous les grands partis londoniens, au pouvoir ou pas, menant campagne pour le « non » - qu'un engouement pour les mirages démagogiques des nationalistes écossais qui a fait monter le vote en faveur du « oui ». En fait, tout se passe comme si 44,7 % de l'électorat écossais avaient profité de l'occasion pour affirmer leur défiance envers les grands partis britanniques et leur politique.

Alors, les trois grands partis ont eu beau crier victoire au lendemain du référendum, c'est quand même bien d'un vote de censure qu'il s'agit, même s'il est limité à l'Écosse. Il est d'ailleurs probable aussi que, si l'occasion était donnée aussi à l'électorat anglais de se prononcer sur la confiance que lui inspirent ces partis et leurs institutions, le résultat serait comparable, sinon bien plus défavorable aux dits partis !

Aujourd'hui, la parenthèse écossaise est provisoirement refermée et les grands partis ont repris leur campagne pour les élections générales de 2015. Les travaillistes, soucieux de préserver leur majorité de députés en Écosse (41 sur 59) et au pays de Galles (26 sur 40), promettent de mettre en place une conférence constitutionnelle pour organiser l'« extension coordonnée » des pouvoirs délégués aux régions du Royaume-Uni... et aussi celui des ressources, l'argent restant le nerf de la guerre. Quant à Cameron, repoussant à plus tard cette extension, il spécule sur l'idée que, après tout, rien ne serait plus naturel que de priver les députés gallois, nord-irlandais et écossais, du droit de voter sur les lois affectant les seuls Anglais.

Ainsi, la politique politicienne reprend tous ses droits, donnant raison aux électeurs écossais qui l'ont sanctionnée... avec l'instrument qu'ils ont trouvé.

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