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Editorial
Reprenons confiance dans notre force collective
Les travailleurs n'avaient évidemment rien de bon à attendre du discours de Valls devant l'Assemblée. Quant au vote qui a suivi, son issue était prévisible : l'Assemblée a voté la confiance au gouvernement et celui-ci s'en prévaudra pour aggraver sa politique antiouvrière.
Les socialistes « frondeurs » ainsi que la plupart des écologistes se sont contentés de s'abstenir. Preuve qu'ils ne veulent s'opposer qu'en paroles et seulement si cela reste sans conséquence. Comme tous les autres socialistes, ils ont bien trop peur d'une dissolution qui pourrait leur coûter leur siège.
Comme quoi le député Thévenoud n'est pas le seul à s'accrocher à son strapontin ! Lui ne voit pas de contradiction entre le fait de ne pas payer ses impôts et son loyer pendant trois ans et rester député. Les frondeurs, eux, ne voient pas la contradiction entre être « contre » le gouvernement et « s'abstenir » pour laisser en place le gouvernement. Ce n'est pas moins lâche et c'est tout aussi inconséquent.
Les frondeurs comme les écologistes font mine de prendre leurs distances avec le gouvernement Valls pour ne pas couler avec le navire. Mais sur le fond, rien ne les sépare du reste de la majorité.
Depuis qu'ils sont élus, ils ont d'ailleurs cautionné tous les sales coups, que ce soient les attaques contre les retraites, les hausses d'impôts ou la loi sur la compétitivité. Il y a trois mois, ils étaient, eux aussi, vent debout contre la grève des cheminots. Alors, faire croire aux travailleurs qu'il y aurait quoi que ce soit à espérer de ces gens-là est une farce.
C'est pourtant dans le cadre de cette politique que les dirigeants du Parti communiste ont accueilli les frondeurs à bras ouverts à la fête de L'Humanité. C'est sur eux qu'ils comptent pour, disent-il, reconstruire une « alternative à gauche » et redonner de « l'espoir à gauche » ! On pourrait en rire, si ce n'était aussi désespérant.
L'expérience a été faite avec Mitterrand, avec Jospin et maintenant avec Hollande : ce n'est pas parce que l'on se dit « socialiste » et que l'on s'assoit à gauche dans le Parlement bourgeois que l'on est dévoué aux intérêts des travailleurs.
L'objectif de reconstruire la « gauche », quand le mot de « gauche » recouvre aussi bien une fraction de l'électorat populaire attachée aux valeurs du mouvement ouvrier que des politiciens ennemis déclarés de la classe ouvrière, est un objectif ambigu et trompeur. La question est de savoir qui est dans le camp des travailleurs et qui ne l'est pas.
Alors, la seule perspective qui vaille est de reconstruire un parti ouvrier, qui mette en avant les exigences des travailleurs, des chômeurs, des retraités. Un parti qui lutte contre les illusions électoralistes et qui n'attende rien de l'opposition de salon, mais qui affirme que le seul moyen pour faire valoir les intérêts du monde du travail et changer la société, c'est la lutte des travailleurs eux-mêmes.
En lieu et place d'une politique de classe, les grandes organisations ouvrières, politiques ou syndicales ont véhiculé des illusions dans des politiciens de gauche qui n'auraient jamais dû mériter la confiance des travailleurs.
Les travailleurs ont été trompés et détournés des combats qu'ils avaient à mener. Ce sont ces désillusions et le sentiment de trahison qui en découle qui font aujourd'hui le lit du Front national.
Eh bien, il faut reprendre le combat. La bourgeoisie n'a jamais rangé les armes. Avec la crise, il est impératif pour les capitalistes de démolir systématiquement les conditions d'existence des travailleurs pour prospérer. Retraites, salaires, conditions de travail, Sécurité sociale, droits syndicaux, services publics, tout y passera si les travailleurs ne réagissent pas.
Le patronat est tellement sûr de sa victoire sur le travail du dimanche et les seuils sociaux qu'il est déjà en train de préparer les coups suivants : la remise en cause du smic, des 35 heures et des jours fériés. S'il n'y a pas d'opposition venant des travailleurs, il continuera.
Valls peut faire des effets de manche, il justifiera les demandes patronales. Il passe déjà son temps à expliquer qu'à cause de la crise il ne peut que faire l'aumône à ceux qui touchent des petites retraites, qu'il faut économiser, supprimer la prime de naissance, revoir le congé parental, payer plus d'impôts... Il fera payer les travailleurs tant que la crise durera pour répondre aux ordres du patronat.
Alors oui, il y a beaucoup à faire. Mais la lutte de classe est là et bien là. Opposer la légitimité des intérêts des travailleurs à celle du patronat, permettre à la classe ouvrière de retrouver la confiance en sa force collective, c'est la seule voie pour les travailleurs.