Brésil : Récession économique et campagne présidentielle17/09/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/09/une2407.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil : Récession économique et campagne présidentielle

À en croire les chiffres donnés par l'Institut national de statistique, la crise mondiale atteint désormais le Brésil, jusqu'ici largement épargné. Alors que la croissance était encore de 7,5 % en 2010, elle était tombée à 1 % en 2012. Cette année, ce serait la récession. Le produit intérieur brut aurait reculé de 0,2 % au premier trimestre, et de 0,6 % au second. L'investissement s'effondre, le secteur industriel est en repli, tout comme la construction et les services.

Parallèlement, l'inflation reprend, pénalisant les salariés, et les licenciements se multiplient. 100 000 postes de travail seraient supprimés cette année à Sao Paulo. Après les élections générales du 5 octobre prochain, où seront élus président et vice-président, gouverneurs des États, sénateurs, députés fédéraux et d'État, il est prévu une série d'augmentations, en particulier de l'essence et de l'électricité, ainsi que des réductions des dépenses publiques, toutes choses qui ne peuvent qu'aggraver la situation des couches populaires.

Ces signes de crise n'arrangent pas les affaires de la présidente Dilma Rousseff, du Parti des travailleurs (PT), en campagne pour sa réélection. Massivement critiquée lors des grandes manifestations de juin 2013, elle a bénéficié du déroulement sans accrocs majeurs de la Coupe du monde de football en juillet. Sa popularité est cependant loin des records du début de sa présidence.

Dilma Rousseff doit donc à tout prix défendre son bilan. Elle affirme contre toute évidence que l'économie du pays se porte bien, que la reprise est là. Son ministre de l'Économie assure que, « s'il y avait une récession, elle est déjà passée », et il explique que la baisse momentanée du PIB est due à la sécheresse et aux jours de congés qui ont accompagné la Coupe du monde. Son concurrent de droite, Aécio Neves, centre naturellement sa campagne sur l'échec économique de l'actuel gouvernement, dénonçant « une récession économique et une inflation hors de contrôle ».

Un autre danger vient d'apparaître pour la présidente, avec la candidature de Marina Silva. Celle-ci n'était que seconde dans le « ticket » d'Eduardo Campos, candidat du Parti socialiste brésilien, un parti allié au PT qui contrôle trois États du Nordeste. Mais Campos est mort le 13 août dans un accident d'avion et elle a pris son relais.

Marina Silva a commencé à militer en Amazonie aux côtés de Chico Mendes, pour la défense des seringueiros, les cueilleurs de caoutchouc. Elle s'est vite lancée dans une carrière politique, au PT d'abord. Elle fut sénatrice de l'État amazonien de l'Acre, puis ministre de l'Environnement de Lula pendant cinq ans. Tout en gardant son discours écologiste, elle a accepté la libéralisation des OGM par Lula et un nouveau Code forestier qui facilite la déforestation de l'Amazonie par les grands groupes privés.

En 2008, parce que Lula lui refusait la direction de l'agence Amazone développement durable, elle a quitté le gouvernement. En 2009, elle a quitté le PT et a adhéré au Parti vert, juste à temps pour pouvoir être sa candidate à la présidentielle de 2010 (au Brésil, on ne peut plus changer de parti un an avant les élections). Elle a alors obtenu 20 millions de voix (soit 19 %), derrière Dilma et le candidat de droite. En 2013, elle a tenté de créer un nouveau parti, le Réseau développement durable, mais, ne réussissant pas à réunir les signatures nécessaires, elle a adhéré au PSB, un an tout juste avant l'élection.

Cette écologiste a donc surtout les dents longues. Elle est par ailleurs membre de l'Assemblée de Dieu, une des principales sectes évangéliques du Brésil, réactionnaire sur les questions de société, en particulier opposée à l'avortement. Un accident d'avion providentiel a fait d'elle à nouveau une candidate à la présidence. Elle affirme qu'elle n'est « ni de droite ni de gauche ». Les sondages la donnent aujourd'hui ex-aequo avec Dilma dès le premier tour.

Telle est donc la candidate qui pourrait profiter du discrédit de Dilma Rousseff pour apparaître comme une alternative. Les travailleurs et les couches populaires n'ont évidemment rien à en attendre, pas plus que du maintien au pouvoir de l'actuelle présidente. Heureusement, ils ont montré récemment qu'ils étaient prêts à descendre dans la rue pour défendre directement leurs intérêts. C'est bien la voie à prendre.

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