La presse, les « experts » et la grève de la SNCM : L'esclavage, c'est moderne !16/07/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/07/une2398.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La presse, les « experts » et la grève de la SNCM : L'esclavage, c'est moderne !

« Marseille : comment la CGT a coulé la SNCM », titrait encore Le Figaro du 10 juillet, le matin même de l'annonce de la fin de la grève des marins de la SNCM. Et de dénoncer des salaires trop élevés, des jours de congés trop nombreux mais aussi la notion de service public, l'intervention de l'État et surtout des travailleurs et des syndicalistes qui osent faire grève pour se défendre au lieu d'accepter de se sacrifier pour que leur entreprise reste compétitive.

S'il y a de la gabegie à la SNCM, c'est la faute des marins syndiqués. Ce refrain a couru toute la presse. « Le feuilleton de la SNCM, c'est ce que la France peut faire de pire quand elle s'abandonne à son ADN contestataire et passéiste », explique l'économiste-expert Nicolas Bouzou. Pour lui, la grève relève du « sabotage du potentiel économique de la France méditerranéenne », rien de moins.

« La vérité oblige à dire que la CGT est au syndicalisme ce que le FN est à la politique. Un boulet national (...). Non seulement, elle enfourche avec obstination toutes les mauvaises causes, mais elle décourage les initiatives, propage des mensonges et attise les haines. Autant dire, doux euphémisme, qu'elle ne contribue pas pour peu au déclin économique de notre pays », écrit Franz Olivier Gisbert dans Le Point, dénonçant au passage les enseignants dont les cours susciteraient les futurs fauteurs de grève.

Dans la presse dite « de gauche », on ne trouve pas mieux. Pour Jean-Marcel Bouguereau, du Nouvel Observateur, les salaires des travailleurs de la SNCM sont « très-trop » généreux. On parle pourtant de 2 200 euros mensuels en moyenne pour les marins et 3 600 euros pour un responsable en cuisine. Rien d'exorbitant et certainement moins qu'un journaliste en fin de carrière...

Pour tous les commentateurs mal intentionnés, les causes des difficultés de la SNCM seraient des salaires trop élevés, un temps de travail insuffisant, des effectifs, des primes et des congés trop nombreux, une défense abusive des acquis sociaux comme du service public, des délégués syndicaux permanents à terre ou l'hérédité des emplois. En bref, pour tous ces gens qui rêvent d'un capitalisme sans entrave, le mal ne peut venir que des travailleurs, a fortiori syndiqués. Ils devraient accepter de perdre tout, en échange de salaires de misère et de conditions de travail indignes. Et pourquoi pas le retour à l'esclavage ?

Tous ces commentateurs en revanche n'ont pas un mot de critique pour un gouvernement qui envisage de liquider la SNCM pour laisser les coudées franches à des capitaux privés. Et même si le conflit est suspendu, les menaces demeurent.

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