Air France - Orly-Ouest : Les passagers craquent, le personnel aussi09/07/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/07/une2397.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Air France - Orly-Ouest : Les passagers craquent, le personnel aussi

Avec l'été, les publicités fleurissent sur des vols idylliques vers des lieux de vacances paradisiaques. Mais le rêve est pour les habitués de la classe affaires, pas pour ceux de la classe « éco » ou des vols low cost, ni pour le personnel des aéroports et des compagnies confronté à des conditions de travail insupportables.

Ainsi, mercredi 27 juin, une salariée d'Air France affectée au départ-avions en piste à Orly-Ouest a tenté de se suicider chez elle. Aussitôt, une représentante de la direction a déclaré : « Ce n'est pas arrivé sur le lieu de travail, ce ne peut donc pas être imputé au travail. » C'est honteux, et faux.

Dans une lettre ouverte, cette salariée a expliqué les raisons de son geste : un travail intenable du fait des sous-effectifs, la polyvalence accrue, les logiciels de gestion de l'activité qui fonctionnent mal, le mépris d'une hiérarchie sourde aux réclamations du personnel...

La direction locale admet que « le pôle clients » - enregistrement des bagages et embarquement des passagers - « est en souffrance ». Mais, pour y faire face, elle propose au personnel concerné... de travailler plus, et plus longtemps lors des pointes, mais sans embauche !

Car au « Passage », c'est-à-dire l'embarquement, comme dans les autres secteurs de la compagnie, il s'agit encore et toujours de faire des économies et de réduire les effectifs. Air France peut claironner qu'elle est revenue « dans le vert », et ses actionnaires s'en féliciter, ses salariés savent de quel prix on le leur fait payer.

Au Passage, l'objectif patronal est d'automatiser au maximum la phase d'accès à l'avion. Avec un personnel réduit au minimum, les passagers, qui doivent souvent se débrouiller pour acheter leurs billets et s'enregistrer sur Internet, éditer leurs cartes d'embarquement et étiquettes de bagage, doivent maintenant placer eux-mêmes sacs et valises dans des appareils dits DBA (dépose bagage automatique).

Vendredi 4 juillet à Orly, un jour de grands départs, en fin de matinée, plus d'une centaine de personnes piétinaient pour déposer leurs bagages aux quatre DBA, incapables d'absorber un tel flux. La foule augmentant sans guère avancer, la tension a explosé contre les employés présents. Cris, insultes, crachats : tout y est passé.

Devant des passagers en colère dont ils ne pouvaient résoudre les problèmes, dix-huit salariés ont craqué nerveusement et ont dû se rendre au centre médical. Chaque jour ou presque, certains s'effondrent en pleurs, s'évanouissent. En un mois, plus de vingt « accidents de travail pour risques psycho-sociaux » (on les nomme ainsi !) ont été enregistrés. Et il peut y avoir des gestes désespérés, comme celui de la salariée du départ-avions.

Air France, dans ses publicités, prétendait « faire du ciel le plus bel endroit de la terre ». Mais elle se garde bien de s'étendre sur les conditions de travail quelle impose à ses salariés, sur terre comme dans les airs.

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