La FIFA, sport et business19/06/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/06/lo-2394.jpg.445x577_q85_box-0%2C130%2C1712%2C2350_crop_detail.jpg

Dans le monde

La FIFA, sport et business

La FIFA (Fédération internationale de football association), qui organise la Coupe du monde de football au Brésil, a récemment défrayé la chronique, en raison du « Qatargate ». Elle n'aurait attribué l'organisation du Mondial au Qatar en 2022 qu'à la suite d'une corruption organisée. La construction des équipements aurait déjà fait dans ce pays 1 200 morts parmi les ouvriers, principalement népalais, soumis à un véritable esclavage salarié. Mais ce n'est que la dernière en date d'une série d'affaires qui ont éclaboussé la Fédération.

Une longue et sale histoire

La FIFA est d'abord une vaste organisation politique et commerciale. Fondée en 1904, elle fut longtemps dirigée par des Français et des Anglais, certes ressortissants de vieilles nations du football, mais aussi des deux principales puissances coloniales. Le fondateur de la Coupe du monde, Jules Rimet, président de la FIFA pendant 33 ans, ne fut pas gêné par l'attribution du Mondial 1934 à l'Italie, pour le bonheur de Mussolini qui utilisa l'événement en soutien au fascisme.

La FIFA a toujours su se ranger du côté des pouvoirs dominants. Ainsi en 1958, pendant la guerre d'indépendance, le FLN algérien constitua une équipe nationale, composée de joueurs qui quittèrent les clubs français qui les employaient ; cette équipe disputa de nombreuses rencontres mais fut interdite de compétition internationale, la FIFA prenant le parti de la France coloniale. En 1978, la dictature des généraux argentins put redorer son blason en organisant le Mondial, malgré un mouvement pour le boycott dans plusieurs pays. Le président de la FIFA, le Brésilien Joao Havelange, reçut une décoration militaire du chef de la junte et il félicita le régime pour l'efficace et « triomphale » organisation de la compétition, tandis que le régime torturait et assassinait ses opposants à quelques encablures des stades.

Le football et la religion de l'argent

La FIFA est aussi une vaste organisation d'affaires, comme l'illustre le scandale de la corruption qatari. Installée en Suisse, elle s'appuie sur de grands partenaires commerciaux, avec lesquels elle négocie des contrats d'exclusivité : Adidas, Coca-Cola, Sony, Visa, Hyundai-Kia Motors. Pour maximiser ses profits, elle fait signer aux pays hôtes un contrat léonin. Ce contrat crée ainsi des zones d'exclusion commerciale autour des stades, jusqu'à 2 km, interdites à tous les vendeurs ambulants qui ne seraient pas enregistrés. Au Brésil, cela concernerait peut-être 300 000 vendeurs, dont une partie s'est mobilisée contre cette pratique qui les prive de leur gagne-pain. Mais la Coupe du monde au Brésil devrait rapporter à la FIFA 5 milliards d'euros, et il faut donc que tout se passe comme prévu.

La FIFA est dirigée depuis 1998 par Sepp Blatter, en concurrence avec Michel Platini, actuel président de l'UEFA, pour un nouveau mandat en 2015. Les deux hommes n'ont aucune divergence sur le fond, et les médias français qui défendent l'ancien numéro 10 le font par chauvinisme. Comme Pelé, Platini s'en est pris aux manifestants brésiliens, leur demandant d'« attendre un mois avant de faire des éclats un peu sociaux ». Autrement dit, il ne faudrait pas que le dénuement et la colère des pauvres empêchent les riches de faire des affaires. Une morale qui est bien celle de la FIFA.

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