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Irak : Un chaos fruit de l'intervention impérialiste
Cela fait déjà plusieurs mois que les combattants de l'EIIL, milice islamiste créée en 2003 après l'invasion américaine, sont parvenus à imposer progressivement leur domination sur les provinces à majorité sunnite du nord de l'Irak, contrôlant notamment la ville de Fallouja depuis janvier dernier. Ils ont certainement bénéficié de la rancoeur des populations à l'encontre du gouvernement du Premier ministre Nouri El-Maliki, constitué d'une coalition de partis religieux chiites, les chiites représentant 54 % de la population irakienne.
Ces divisions religieuses ont servi de longue date au pouvoir pour asseoir son emprise sur la population irakienne. Même si son régime s'affirmait laïc, Saddam Hussein avait cherché à s'appuyer sur la minorité sunnite dont il était issu. Mais ce sont les dirigeants américains eux-mêmes qui ont délibérément attisé les haines religieuses pour chercher à donner une base au pouvoir qu'ils avaient mis en place après avoir renversé Saddam Hussein. Ils ont interdit son parti, le Baath, qui fournissait les principaux cadres du régime, et dissous l'armée irakienne. Le nouveau pouvoir a d'emblée eu une base confessionnelle, se basant sur la loi islamique et sur les partis et milices chiites. Premier résultat de la politique américaine, entre 2006 et 2009, une guerre civile meurtrière avait opposé milices chiites et sunnites.
Le gouvernement qui s'était mis en place avait alors intégré des ministres sunnites, dans un souci d'apaisement des conflits religieux. Mais, depuis un an, ces ministres ont presque tous démissionné, après la répression des manifestations appelées par des organisations sunnites au printemps 2013. Le gouvernement irakien, privé de l'appui des soldats américains depuis leur départ fin décembre 2011, doit faire face à une contestation croissante. Issu d'une coalition de groupes en concurrence pour le pouvoir, son autorité n'a fait que s'affaiblir ces derniers mois.
La radicalisation des affrontements religieux a été encore accentuée par la guerre civile en Syrie, pays voisin de l'Irak. L'EIIL, dès le début des combats dans ce pays, y a envoyé des militants. Tous les djihadistes ont pu trouver sur ce front le soutien et le financement des États qui cherchaient des troupes pour intervenir dans le conflit syrien. La Turquie, l'Arabie saoudite, le Qatar ont fourni à ces milices l'armement dont elles avaient besoin, avec l'approbation des États-Unis mais aussi de la France et des pays occidentaux en général, pas mécontents de pouvoir affaiblir le régime d'Assad.
Avec le retour en Irak des milices islamistes bien armées et aguerries, cette politique se retourne aujourd'hui contre les dirigeants américains, qui voient le pouvoir qu'ils ont mis en place menacé d'effondrement. Visiblement, ils ne savent plus très bien comment intervenir dans le chaos qu'ils ont contribué à créer, dans cet éclatement de la région qui est leur oeuvre, mais qu'ils ne réussissent plus à contrôler. Au point d'envisager maintenant une alliance avec l'Iran, après des années de rupture avec celui-ci.
En attendant, les populations paient au prix fort les conséquences de cette politique cynique et de l'intervention américaine qui, comme une mauvaise plaisanterie, promettait d'apporter liberté et progrès. Destruction, appauvrissement, régression, règne des milices religieuses, obscurantisme et éclatement du pays, voilà le bilan de l'intervention impérialiste !