Algérie : La réélection de Bouteflika et une abstention record30/04/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/05/une2387.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Algérie : La réélection de Bouteflika et une abstention record

Lundi 28 avril, Abdelaziz Bouteflika a prêté serment pour un quatrième mandat. Son score de 81,5 %, soit près de 8,5 millions d'électeurs, n'a pu occulter l'abstention massive qui a marqué l'élection présidentielle du 17 avril dernier. Le taux officiel de participation s'est élevé à 50,7 %. 11 millions de personnes se sont donc abstenues, en réalité certainement beaucoup plus.

Sur les cinq candidats en lice face à Bouteflika, deux figures plus connues ont marqué la campagne : Ali Benflis, ancien chef du gouvernement de Bouteflika en 1999 et rival aux présidentielles de 2004, ainsi que Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT) et première femme à s'être présentée à l'élection présidentielle en 2004. À noter que les partis islamistes avaient appelé pour la première fois au boycott du scrutin.

Une campagne agitée... dans les médias

Commencée dans l'indifférence générale, la campagne s'est peu à peu emballée. Le directeur de campagne de Bouteflika, puisque ce dernier ne faisait pas personnellement campagne, a sillonné le pays en promettant des logements, des emplois et des infrastructures à la population. Benflis, porté par l'affluence réelle à ses meetings, a dénoncé la fraude massive prévisible. L'ambiance était à la discussion, dans les familles, la rue, les entreprises, sans pour autant lever la profonde méfiance de la population, persuadée à juste titre que le résultat de l'élection ne changerait rien à son sort. La colère d'une partie de la jeunesse s'est même exprimée le jour du scrutin.

Des manifestations contre la mascarade électorale ont eu lieu à Raffour, près de Bouira, dans le sud-est d'Alger, ainsi que dans le sud, près de Ouargla.

Par leur abstention massive, les masses populaires ont clairement sanctionné le régime, plus que par le vote Benflis qui n'a officiellement obtenu que 12,1 % des voix. Louisa Hanoune, arrivée en quatrième position avec 1,37 % des voix, fut la seule à réclamer l'échelle mobile des salaires, ou l'abrogation du code de la famille et son remplacement par des lois civiles. Un des aspects notables de sa campagne a été de faire clairement allégeance au régime en déclarant par exemple : « Notre défi au Parti des travailleurs est (...) de préserver notre pays du Printemps arabe. » Après les élections, elle a affirmé : « En votant pour le président Bouteflika, le peuple algérien a choisi les acquis de la paix et de la sécurité. » Une offre de services on ne peut plus claire, puisqu'elle a ajouté que son parti était prêt à siéger au sein de l'exécutif si la Constitution était révisée et des élections législatives anticipées organisées.

La révision de la Constitution : une fausse barbe

Le petit monde politicien de l'opposition est surtout occupé par les tractations, prélude à une prétendue « transition démocratique ». Prêt à dialoguer avec le pouvoir sur les réformes constitutionnelles, il est surtout intéressé par la course aux places et se projettent dans l'après-Bouteflika. Les classes populaires n'ont rien à espérer de toute cette agitation, ni d'une quelconque révision de la Constitution, annoncée par Bouteflika lui-même. Leurs conditions de vie et de travail sont à mille lieues des préoccupations de ces politiciens.

D'autant que ces derniers sont prêts à justifier les attaques prévisibles du gouvernement contre les travailleurs, au nom du même réalisme économique dont on nous rebat tant les oreilles de ce côté de la Méditerranée.

Malgré quelques annonces faites en guise de cadeau présidentiel, telle l'augmentation des retraites de 10 à 15 %, des augmentations des prix du gaz et de l'électricité se profilent déjà à l'horizon. Le nouveau « pacte de développement et de progrès » promis par Bouteflika entend bien perpétuer les multiples cadeaux concédés par le régime au patronat algérien et aux multinationales ; il prévoit aussi de s'attaquer au code du travail. Autant dire que la classe ouvrière algérienne ne pourra compter que sur elle-même pour riposter à l'offensive déjà programmée des cercles dirigeants de l'État et de la bourgeoisie.

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