- Accueil
- Lutte ouvrière n°2386
- Nos lecteurs écrivent : Copropriété, les syndics s'engraissent
Leur société
Nos lecteurs écrivent : Copropriété, les syndics s'engraissent
« Dans Lutte Ouvrière du 4 avril, vous titrez très justement à propos de la Loi Duflot, publiée au Journal officiel le 27 mars, « La montagne a accouché d'une souris ». L'article porte sur l'encadrement des loyers du secteur privé.
La loi Duflot, ou loi ALUR (Accès au logement et à un urbanisme rénové), concerne aussi les rapports entre les syndics professionnels qui administrent les copropriétés et les copropriétaires. Elle est censée permettre à ceux-ci de mieux contrôler la gestion financière de leur copropriété par leur syndic. La loi prévoit aussi que les honoraires supplémentaires, qui se rajoutent au forfait de base du contrat de syndic, soient mieux encadrés.
En effet les associations de consommateurs et les associations de copropriétaires, comme l'ARC, ont depuis longtemps dénoncé des honoraires supplémentaires prohibitifs ou farfelus que s'octroient les syndics. Ainsi : l'envoi d'une lettre recommandée à 40 euros, des contrats qui à 88 % incluent des mentions illégales ou abusives concernant les honoraires pour le suivi de travaux, etc.
Mais beaucoup des dispositions de la loi renvoient à des décrets qui peut-être ne sortiront jamais ou bien qui, au final, risquent d'être largement édulcorés pour ne pas nuire aux gros syndics qui dominent le marché, comme Foncia, Nexity, Citya et Immo de France. Il faut s'attendre à ce que ces groupes fassent pression, dans les négociations qu'ils mèneront avec les représentants du ministère, pour défendre leurs intérêts financiers en maintenant des prix trop élevés.
Sur l'une des mesures les plus importantes du projet de loi -- l'obligation de l'ouverture d'un compte bancaire séparé pour chaque copropriété -- les grands groupes de syndics ont déjà réussi à faire plier la ministre Cécile Duflot. Jusqu'à présent, la loi permettait au syndic de se soustraire à cette obligation en faisant voter en assemblée des copropriétaires une dispense d'ouverture d'un compte séparé, sous la menace d'une augmentation du prix du contrat pouvant aller jusqu'à 20 ou 30 % dans le cas contraire, ce qui est très dissuasif. Résultat, dans la très grande majorité des copropriétés, l'argent des charges courantes et des travaux se trouve déposé sur un compte unique au nom du syndic, sur lequel transitent les fonds de toutes les copropriétés qu'il gère, ce qui peut représenter de très grosses sommes. Cela lui permet, en faisant fructifier cet argent, d'empocher avec les banques des bénéfices supplémentaires conséquents.
Le compte unique entraîne aussi une opacité des mouvements des fonds, qui empêche les conseillers syndicaux élus par les copropriétaires d'assurer complètement leur mission de contrôle de la gestion du syndic.
La ministre Cécile Duflot avait annoncé une révolution dans les rapports entre syndics et copropriétaires. Mais, en définitive, elle a cédé à la pression des syndics et des banques puisque la loi fait porter l'obligation d'ouverture d'un compte séparé aux seules copropriétés de plus de quinze lots (autrement dit locaux principaux ou appartements), ce qui, selon le chiffre fourni par l'ARC, exclut de la loi près de 60 % des copropriétés !
Sous prétexte que la nouvelle réglementation leur coûterait cher, les syndics cherchent déjà à imposer une forte augmentation du prix de leur contrat de base. Et malheureusement, à n'en pas douter, ils continueront à trouver auprès du nouvel occupant du ministère une écoute attentive et complaisante ! »