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Irak : Le recul dramatique des droits des femmes
Dans le passé, par rapport aux autres pays du Moyen-Orient, les Irakiennes bénéficiaient d'un peu plus de libertés. Les luttes menées par les femmes dans les années 1950 avaient abouti à un statut, le statut personnel de 1959, qui garantissait notamment le droit à l'éducation, au divorce et à la garde des enfants, interdisait le mariage des fillettes, rendait la polygamie plus difficile, et surtout enlevait aux hiérarchies religieuses le pouvoir de régler ces questions. Dans les cas non prévus par cette loi irakienne sur le statut personnel des femmes, c'était néanmoins la charia qui pouvait s'appliquer. La Constitution adoptée en 1970 disait garantir l'égalité hommes-femmes. Et en 1980 le droit de vote fut accordé aux femmes.
Mais, depuis l'irruption des milices intégristes dans la vie sociale et politique, irruption favorisée par les différentes interventions impérialistes, les femmes ont perdu quasiment tous leurs droits dans les faits. Selon Hanaa Edwar, une militante des droits des femmes, fondatrice d'Al-Amal, une organisation de défense des droits humains basée à Bagdad, la polygamie est désormais permise et pratiquée. « Des femmes de 10 ans sont données pour mariage à un autre clan. Il existe des « mariages temporaires » ou « mariages de plaisir », qui peuvent ne durer qu'une semaine. Même des religieux encouragent cette pratique. Mais les femmes qui sont abandonnées ensuite n'ont droit à rien », explique-t-elle.
Les femmes sont celles qui paient le plus les conséquences des différentes guerres et attentats. Ainsi, les 1 500 000 veuves qu'il y a actuellement en Irak, selon les chiffres officiels, vivent très difficilement car il leur est quasiment impossible de trouver un travail pour nourrir leur famille. 71 % des femmes sont sans travail et seule une minorité reçoit une pension de veuve de guerre. Alors qu'en 1970 la quasi-totalité des Irakiennes étaient alphabétisées, seules 40 % fréquentent aujourd'hui les salles de classe.
Les droits des femmes ont reculé avec la dégradation des conditions matérielles et politiques dans le pays. Cela a commencé lors de la guerre Iran-Irak et a empiré au moment de la guerre du Golfe en 1991. Saddam Hussein, en guerre contre la coalition impérialiste autour des États-Unis, voulant s'assurer le soutien des mouvements islamistes, lança ainsi entre autres une « campagne de la fidélité » qui visait à éliminer les prostituées par la décapitation et qui permit d'exécuter des femmes opposantes au régime. Il introduisit également dans le code pénal l'exemption de peine pour les hommes coupables de crimes d'honneur.
La situation des femmes s'est encore détériorée à partir de 2003, suite à la guerre suivie de l'occupation de l'Irak par l'armée américaine soutenue par ses alliés impérialistes. Les dirigeants américains prétendaient alors que l'arrivée des armées impérialistes apportait la démocratie et la libération des femmes. Il n'en fut rien. Après la chute du régime de Saddam Hussein, dans le chaos instauré par la guerre, la vie des femmes devint encore plus difficile, la pression des islamistes se faisant sentir quotidiennement. Le Conseil provisoire, mis en place par les États-Unis, s'attaqua alors au code de 1959, avec leur approbation. S'il ne parvint pas à le supprimer totalement, il finit malgré tout par redonner aux autorités religieuses le pouvoir sur les femmes qu'il leur avait enlevé en partie.
Les dirigeants impérialistes, en appuyant les éléments les plus réactionnaires de la société, en attisant les conflits religieux, ont contribué à renforcer la domination des partis islamistes, l'influence des imams ou des chefs tribaux. Pour toute la société, mais plus encore pour les Irakiennes, l'invasion occidentale s'est traduite par un retour d'un demi-siècle en arrière.