- Accueil
- Lutte ouvrière n°2378
- Réforme bancaire européenne : Banquiers et gouvernements contre les peuples
Leur société
Réforme bancaire européenne : Banquiers et gouvernements contre les peuples
Objet de la discorde : le projet de réforme des grandes banques européennes proposé par ce dernier, qui veut d'une part contraindre les banques dites universelles, c'est-à-dire qui cumulent les activités d'une banque de dépôt et celles d'une banque d'affaires, à séparer ces deux types d'activités, d'autre part leur interdire de spéculer pour leur propre compte.
Il s'agit, explique Michel Barnier, de limiter les risques que font courir à l'économie, aux États et aux contribuables, qui sont appelés à la rescousse en cas de crise, les « banques trop grosses pour faire faillite, (...)et trop chères à sauver avec des fonds publics ».
La crise bancaire mondiale de 2008-2009, rappelle Michel Barnier, a coûté « 1 600 milliards d'euros de soutien au secteur financier, soit l'équivalent de 13 % du PIB européen ».
Sont visées par la réforme les trente plus grosses banques européennes. Un certain nombre d'entre elles ont un bilan globalement équivalant au produit intérieur brut de leur pays. Le bilan de la Deutsche Bank par exemple représente 80 % du PIB de l'Allemagne, et celui de la BNP Paribas est supérieur au PIB de la France. Pour la France, outre BNP Paribas, trois autres banques, Crédit agricole, Société générale et BPCE, sont concernées.
La réforme européenne pilotée par Michel Barnier, ancien ministre de Sarkozy-Fillon, n'a rien de révolutionnaire. Des exceptions sont prévues, qui permettent aux banques d'échapper à l'obligation de séparation des activités. Elle n'en a pas moins suscité une levée de boucliers du côté des gouvernements allemand et français.
En France, Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, et à ce titre responsable de la régulation du secteur bancaire en France, a jugé « les idées qui ont été mises sur la table par Michel Barnier (...) irresponsables et contraires aux intérêts de l'Union européenne ». Même son de cloche chez Pierre Moscovici, ministre PS de l'Économie, qui aurait fait connaître à l'auteur UMP de la loi son « courroux » et ses « profondes réserves ». L'obligation pour les banques de séparer leurs activités de marché et de dépôt faisait pourtant partie des promesses de campagne du candidat Hollande. Il faut croire que le sujet est plus que sensible, et que les banquiers ont l'oreille du président.
Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde du 13 février, le gouverneur de la Banque de France, tout en reconnaissant que « l'objectif poursuivi par la Commission est légitime », explique que « les modalités retenues sont dangereuses », parce qu'elles « conduiraient probablement à de très grosses difficultés de financement pour nos entreprises ». Comme si la crise financière, provoquée par ces banques « trop grosses pour faire faillite » et qui dure encore aujourd'hui, ne s'était pas traduite par de « très grosses difficultés pour nos entreprises ».
Le fait de mélanger activités de marché et activités de crédit-dépôt permet aux banques de bénéficier, fût-ce implicitement, de la garantie publique pour leurs activités spéculatives, par extension de celle dont elles bénéficient en raison de leur activité de banque de dépôt. Et, surtout, cela permet en cas de crise de transférer sur les États, et donc les contribuables, les conséquences des risques que prennent ces banques. C'est de cela qu'il s'agit, et c'est bien ce qui est dangereux, pour l'économie et pour les populations.
La seule réforme qui vaille, pour empêcher les banquiers de nuire et pour mettre les banques au service de l'économie, serait de les exproprier et de les placer sous le contrôle de la population.