Doliprane, Efferalgan, Dafalgan... Symboles de l'absurdité du système05/02/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/02/une2375.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Doliprane, Efferalgan, Dafalgan... Symboles de l'absurdité du système

Doliprane, Efferalgan, Dafalgan... Chaque année, il se vend des centaines de millions de boîtes de ces médicaments. Un magot que les laboratoires qui commercialisent ces produits ne sont pas prêts à lâcher.

Doliprane de Sanofi, Efferalgan et Dafalgan des laboratoires BMS (Bristol Myers Squibb) bénéficient d'une exception réglementaire qui se traduit par un véritable monopole. En effet, bien que constituées d'un principe actif - le paracétamol - dont le brevet est tombé dans le domaine public depuis des lustres, ces trois spécialités ne sont pas « génériquées ». Cependant, puisque le paracétamol n'est plus protégé par un brevet, une quinzaine de laboratoires pharmaceutiques en fabriquent et le commercialisent. Et on peut donc acheter en pharmacie, sans ordonnance et en les payant de sa poche, ces boîtes de paracétamol, de même que du Doliprane, de l'Efferalgan ou du Dafalgan.

Par contre, si un médecin prescrit sur ordonnance ces trois médicaments de marque, le pharmacien ne peut pas délivrer un autre paracétamol. Parce que ces médicaments ne sont pas inscrits au Répertoire des génériques. Ceci parce qu'à l'époque où ils auraient dû l'être, au début des années 2000, Sanofi (à l'époque Aventis) et BMS ont exercé toutes les pressions nécessaires auprès des autorités sanitaires contre une telle inscription afin d'être sûrs de pouvoir continuer à vendre toutes les boîtes prescrites, sans remplacement par le pharmacien. Avec plus de 250 millions de boîtes de Doliprane et près de 200 millions de boîtes d'Efferalgan et de Dafalgan vendues chaque année, c'est une rentrée que ni Sanofi ni BMS ne voulaient et ne veulent laisser filer.

Au mois de décembre, sous la pression de l'Autorité de la concurrence, l'Agence du médicament a envisagé de mettre fin à l'exception et d'inscrire ces médicaments au répertoire des génériques. Sanofi et BMS sont immédiatement partis en guerre, faisant du chantage, avançant que si leurs produits de marque sont génériqués, ils en vendront moins et seront donc contraints de supprimer des emplois. Sanofi fait planer la menace sur les 220 salariés du site de Lisieux, dont le Doliprane est la fabrication quasi exclusive, et sur celui de Compiègne où il représente un quart de la production. Pour BMS, c'est l'usine d'Agen qui est dans le collimateur. Les syndicats estiment que, pour l'ensemble des deux laboratoires, près de 2 000 emplois sont menacés en tenant compte de la fabrication, de la distribution, des forces de vente et des sous-traitants.

De leur côté, groupés derrière le drapeau de la libre concurrence, la quinzaine de fabricants de paracétamol partent en guerre contre les trois médicaments protégés des deux géants de la pharmacie. Et les pharmaciens sont eux aussi sur la sellette, puisque leur système de rémunération est plus profitable avec les génériques qu'avec les produits de marque.

Le paracétamol est un des médicaments les plus consommés, on sait le fabriquer, le mettre sous des formes et des dosages différents, il est utile et efficace. Mais il n'est pas produit pour toutes ces qualités, ni même pour satisfaire des besoins. Il est produit pour que les industriels qui le font fabriquer en extraient le maximum de profits... au point qu'ils se battent pour cela. Comme c'est la règle pour toutes les productions industrielles.

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