Goodyear - Amiens : Montebourg fait la morale aux ouvriers15/01/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/01/une2372.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Goodyear - Amiens : Montebourg fait la morale aux ouvriers

« Goodyear, CGT, maintenant ça suffit, faites un effort et allez l'un vers l'autre ! » a déclaré le ministre du Redressement productif, Montebourg, après que les ouvriers de l'usine ont retenu deux hauts cadres pendant une trentaine d'heures.

Le ministre socialiste n'est pas sans connaître tous les coups que la direction a fait pleuvoir sur les salariés depuis sept ans que dure le bras de fer à propos de la fermeture de l'usine : pressions, provocations, procès contre les militants et enfin annonce de l'envoi des lettres de licenciement avec des indemnités dérisoires. Pourtant c'est aux ouvriers qu'il fait la morale en déclarant en substance qu'il faut savoir s'aimer les uns les autres et discuter avec leurs pires ennemis en tendant l'autre joue.

Lors des primaires socialistes en vue de l'élection présidentielle, Montebourg avait fait de sa harangue sur le parking de l'usine Goodyear d'Amiens un point fort de sa campagne promettant d'interdire « les licenciements boursiers ». Une fois au pouvoir, les socialistes ont voté la loi sur la flexibilité qui permet aux patrons de licencier plus facilement et menacé il y a deux semaines les travailleurs de Goodyear de faire intervenir contre eux les compagnies de CRS s'ils ne relâchaient pas suffisamment vite les deux cadres.

Montebourg affirme qu'il a des assurances du PDG de Titan, sous-traitant de Goodyear, quant à la reprise d'une partie du site et qu'il faut donc se montrer humble, obéissant et poli afin de ne pas l'effrayer. Rappelons qu'il y a un an et demi, ce PDG, Charles Taylor, déclarait que les ouvriers de l'usine « ne travaillaient que trois heures » puis allaient « flâner comme si vous étiez dans un salon de beauté ». Il qualifiait les militants CGT de l'usine de « timbrés » et de « barjots du syndicat communistes », invitant Montebourg à « les envoyer à la Légion étrangère en Afrique ». Commentant la retenue des deux cadres par les salariés, il a affirmé qu'« aux États-Unis, on appellerait ça un kidnapping. Ces gens seraient arrêtés et poursuivis. C'est un crime très sérieux et vous risquez la prison à vie » Et d'ajouter : « Mon Dieu, ils sont mabouls. »

Ce même PDG exige que tous les ouvriers soient au préalable licenciés avant d'en réembaucher - peut-être - 300 sur les 1.200, triés sur le volet et à ses conditions.

« On n'attire pas les mouches avec du vinaigre » tempête Montebourg qui exhorte les salariés à « mettre de l'eau dans leur vin ». Tendre la joue droite à des mouches n'est déjà pas ragoûtant, jouer les enfants de choeurs avec un essaim de taons qui affichent leur volonté de vous sucer le sang friserait l'idiotie.

Tout « mabouls » qu'ils soient, les ouvriers ont donc sagement décidé de continuer le blocage des stocks de pneus qu'ils ont entamé voici deux semaines et ils occupent désormais l'usine. Ils réclament deux années de congé reconversion où ils continueraient à toucher leur salaire actuel et une prime de licenciement de 80.000 euros, à laquelle s'ajoutent 2.000 euros par année d'ancienneté. Exigences somme toute modestes au regard de la richesse de la multinationale. Le seul stock de l'usine d'Amiens compte 241.000 pneus, en majorité destinés aux tracteurs, dont certains coûtent jusqu'à 8.000 euros pièce.

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