Italie, le naufrage de Lampedusa : Les larmes hypocrites des responsables10/10/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/10/une2358.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie, le naufrage de Lampedusa : Les larmes hypocrites des responsables

Depuis que, jeudi 3 octobre, une embarcation de fortune a fait naufrage à quelques centaines de mètres des plages de la petite île italienne de Lampedusa, on assiste à un concert de déclarations hypocrites des différents dirigeants européens.

En effet ce naufrage, qui vient après bien d'autres, détient le record du plus grand nombre de morts : 155 survivants seulement ont été secourus sur les 400 à 500 passagers que comptait l'embarcation.

Le drame a suscité la solidarité immédiate des 5 000 habitants de Lampedusa. Des pêcheurs et des touristes ont utilisé leurs bateaux pour tenter de retrouver des survivants pendant que d'autres essayaient de prêter main-forte sur terre. « Nous n'avons plus de place pour les vivants et maintenant nous ne savons pas où mettre les morts », s'exclamait Giusi Nicolini, la maire de Lampedusa. Il faut dire que l'île est devenue la « porte de l'Europe » pour des milliers de femmes et d'hommes, et parfois de familles entières, qui fuient la guerre, les conflits ethniques ou tout simplement la misère et sont prêts à braver la mort pour un espoir de vie meilleure en Europe.

Les quelque 200 kilomètres qui séparent les côtes tunisiennes des plages de Lampedusa se transforment en une expédition mortelle pour nombre de réfugiés, qui n'ont d'autre choix que de s'en remettre aux mafias de passeurs clandestins pour des sommes exorbitantes. Quant à ceux que les autorités interceptent, ils atterrissent dans le centre d'accueil de l'île, prévu pour 250 personnes mais qui en héberge plus d'un millier dans des conditions lamentables.

Outre le pape, dans son rôle lorsqu'il dénonce le « manque d'amour et la mondialisation de l'indifférence », tout le monde y est allé de sa déclaration d'émotion au sein du gouvernement italien. Letta, le Premier ministre, a décrété une journée de deuil national. En même temps Alfano, le ministre de l'Intérieur, s'est empressé de répondre, à ceux qui mettaient en cause la loi Bossi-Fini de restriction de l'immigration, qu'en ces jours de deuil il ne fallait pas polémiquer... Pourtant cette loi criminalise le séjour clandestin dans le pays et toute personne le facilitant, ce qui peut viser par exemple y compris les personnes portant secours à un naufragé !

Les dirigeants italiens ont par ailleurs dénoncé le manque de solidarité de l'Europe pour faire face au problème de l'immigration. Mais ce qu'ils entendent par là, c'est une coopération pour mieux empêcher les réfugiés d'arriver jusqu'à leurs côtes.

Les dirigeants des pays riches d'Europe interpellés par leurs collègues italiens font maintenant mine de se désoler du sort de ces malheureux réfugiés. Mais si ceux-ci prennent la mer dans de telles conditions, c'est bien parce que tous les pays européens ont durci leur législation et rendent l'immigration légale pratiquement impossible, sous prétexte qu'ils ne peuvent « accueillir toute la misère du monde ».

Une des solutions envisagées par les dirigeants européens est de convaincre les régimes africains de limiter ces départs en créant leurs propres camps de rétention, avec les conditions qu'on imagine. C'est d'ailleurs ce qui avait été mis en place dans la Libye de Kadhafi, suite à un accord avec le gouvernement italien. Et c'est bien la seule réalisation concrète des pays riches d'Europe en matière « de collaboration avec les pays d'origine des réfugiés ».

Les migrants qui prennent la route de l'Europe, au risque d'y laisser la vie, ne cesseront pas de le faire. Ils y sont poussés par le désespoir, la misère et l'instabilité politique et militaire de leur pays. Il y a là des situations héritées de l'intervention des pays impérialistes. Ceux-ci ont bâti leur puissance sur l'exploitation des pays d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Asie. C'est leur politique dans ces pays, le soutien accordé aux dictateurs locaux ou à des bandes armées rivales, leurs interventions militaires directes ou indirectes, qui contribuent à transformer des centaines de milliers de femmes et d'hommes en réfugiés et, pour certains, en candidats à l'exil. La moindre des choses serait qu'ils consacrent une petite partie de leur richesse à les accueillir de façon à ce qu'ils ne meurent plus en mer dans des tentatives désespérées.

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