États-Unis : Bras de fer entre les deux partis... l'obamacare au coeur du conflit10/10/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/10/une2358.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : Bras de fer entre les deux partis... l'obamacare au coeur du conflit

Une semaine après que le bras de fer engagé au Congrès entre les Républicains et les Démocrates eut entraîné une paralysie budgétaire et la fermeture de bon nombre d'administrations fédérales, il n'y a pas de déblocage rapide en vue. Aucun des deux camps ne semble prêt à céder pour l'instant. Les responsables républicains veulent se servir de la menace de mettre le gouvernement en faillite, en refusant de l'autoriser à emprunter au-delà du plafond actuel de la dette, pour faire plier Obama. Celui-ci affirme qu'il ne cédera pas au chantage et met au défi les Républicains de mettre les États-Unis en faillite.

Le bras de fer continue donc, bien que dans les deux camps une partie des élus, sous la pression de la désapprobation publique qui atteint fortement les deux partis, soit en faveur d'un compromis rapide. Le Congrès a cependant décidé que les 800 000 fonctionnaires mis en congé d'office seront payés à leur retour et le Pentagone a immédiatement annoncé qu'il rappelait les quelque 350 000 fonctionnaires qui lui sont attachés. Les militaires, eux, n'ont pas été touchés par les mises en congé d'office.

Au départ, les Républicains ont placé au coeur de leur chantage l'ajournement de la réforme de l'assurance-santé qu'Obama avait fait voter en 2010. Ils exigent maintenant une négociation sur les économies budgétaires à réaliser. C'est que la loi sur l'assurance-santé a commencé à s'appliquer le 1er octobre. Des millions de personnes se sont précipitées sur le site internet du gouvernement fédéral pour savoir ce à quoi elles avaient droit, au point d'ailleurs que le site a été incapable de faire face aux demandes. Obama y voit évidemment un intérêt pour sa réforme alors que les Républicains pointent les dysfonctionnements informatiques pour justifier leur demande d'ajournement.

La couverture maladie d'Obama pour une minorité de nouveaux assurés

Obama avait présenté sa loi comme permettant d'offrir une couverture médicale aux quelque 50 millions de personnes qui en étaient dépourvues. Medicaid, la couverture médicale publique des plus pauvres, devait être étendue pour couvrir tous ceux dont le revenu était en dessous de 133 % du seuil de pauvreté. Les entreprises de plus de 50 personnes devaient fournir une assurance à leurs salariés sous peine d'amende. Et toutes les autres personnes devaient souscrire, également sous peine d'amende, une assurance médicale auprès d'assurances privées qui accepteraient de figurer dans une espèce de bourse aux assurances dans chaque État. Les personnes dont le revenu est compris entre le seuil de pauvreté et quatre fois ce seuil seraient aidées financièrement pour payer leur prime d'assurance.

Mais la loi originelle a été sérieusement modifiée sous pression des Républicains et des entreprises. En juin 2012, la Cour suprême, tout en validant la loi, a laissé la liberté aux États d'étendre ou pas Medicaid et de couvrir ainsi des millions de nouveaux pauvres. En juillet dernier, Obama lui-même a repoussé en 2015 l'obligation faite aux entreprises mais pas celle faite aux particuliers.

Des différences selon les États

Aujourd'hui la moitié des États, en particulier les États républicains du sud, refusent d'étendre Medicaid, bien que l'État fédéral subventionne 100 % de cette extension la première année, puis 90 % les années suivantes. En fait, cela laisse 8 millions de pauvres (sur 14 millions) sans aucune aide. Ces 26 États concentrent en effet 68 % des pauvres sans assurance, Noirs, mères célibataires, et 60 % des travailleurs pauvres sans assurance.

Quatorze États ont mis en place leur propre « bourse aux assurances privées » et c'est l'État fédéral qui se substitue aux 36 autres, d'où d'ailleurs l'engorgement du site fédéral. Les personnes qui ont réussi à obtenir des informations et qui ont le droit de bénéficier d'une subvention de l'État fédéral pour acheter une assurance se sont rendu compte que la subvention fédérale permettait de ne pas payer trop cher une assurance moyenne dite « argent » et même rien du tout parfois pour une assurance de base dite « bronze », mais qui ne couvre que 60 % des dépenses, le reste étant à la charge de l'assuré.

Les chiffres officiels estiment qu'en 2014 la loi permettra de couvrir 14 millions de personnes et 25 millions en 2020, mais qu'elle laissera alors 30 millions de personnes sans aucune couverture médicale.

Ainsi cette loi est bien loin d'offrir une couverture maladie universelle. C'est une espèce d'usine à gaz qui permettra certes de couvrir un peu mieux une partie des personnes actuellement non assurées. Mais la loi fait surtout la part belle aux assureurs privés qui vont voir un afflux de nouveaux clients dont beaucoup seront subventionnés par l'État pour pouvoir payer les primes, parfois très élevées, qu'ils demandent.

Républicains et Démocrates peuvent bien se déchirer à propos de cette loi, il n'en reste pas moins que dans le pays le plus riche du monde, ils sont bien incapables, par démagogie réactionnaire et raciste, par faiblesse devant le patronat, de mettre sur pied un système qui permette à tous les hommes, femmes et enfants de se soigner correctement. Et c'est la population qui en a le plus besoin qui est sacrifiée sur l'autel des calculs politiciens.

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