Saisie par la fédération CGT des salariés de la construction, l'Agence nationale de sécurité sanitaire vient de reconnaître que l'exposition aux produits bitumineux présente un risque cancérigène. Cela conforte un jugement rendu en novembre 2012 par la cour d'appel de Lyon, qui avait déclaré la société Eurovia, une filiale de Vinci, responsable de la mort d'un ouvrier suite à un cancer de la peau. Celui-ci travaillait sur les routes, dans les vapeurs de bitume, sans autre protection que ses vêtements.

Comme toutes les entreprises du bâtiment ou des travaux publics, Eurovia avait minimisé les risques encourus par les travailleurs, basant sa défense sur le fait que c'était l'exposition au soleil qui était seule à l'origine du mélanome. Ces entreprises se sentent d'autant moins tenues de fournir à leurs salariés des habits et masques de protection que la plupart d'entre eux sont des travailleurs immigrés, qui multiplient les chantiers et les entreprises de BTP en fonction des offres d'emploi, et que cette forme de cancer peut se déclencher des années après qu'ils les ont quittés, parfois même lorsqu'ils sont retournés dans leur pays pour la retraite.

L'ANSS demande aux entreprises qui utilisent des produits bitumineux de prendre des mesures de prévention, notamment en réduisant le temps d'exposition de leurs salariés à ces produits, ainsi qu'en instaurant un suivi médical. Si la reconnaissance du risque encouru par une agence officielle est une petite avancée pour les dizaines de milliers de travailleurs exposés aux composantes du bitume, l'exemple de l'amiante montre malheureusement qu'il risque de falloir un long combat pour que les entreprises du BTP fassent passer la santé et la vie des travailleurs avant leurs profits.