Grande-Bretagne – intervention en Syrie : Un rejet ambigu04/09/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/09/une2353.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne – intervention en Syrie : Un rejet ambigu

Le Parlement britannique a finalement rejeté la motion du gouvernement Cameron portant sur la Syrie. Pourtant celui-ci avait pris grand soin de la rédiger de façon à ce qu'elle puisse être votée même par ceux qui ne voulaient pas paraître endosser la responsabilité d'un nouveau bourbier au Moyen-Orient.

Le régime d'Assad y était condamné en termes prudents et la motion comportait une clause prévoyant un second vote du Parlement pour autoriser formellement une éventuelle intervention militaire britannique.

Mais rien n'y a fait. Rappelés en session extraordinaire le 29 août, les députés ont infligé un camouflet à Cameron en repoussant sa motion par 285 voix contre 272 - une faible majorité, sans doute, mais qui cache quand même le fait que 41 députés de la coalition au pouvoir ont refusé leur soutien à Cameron, dont 30 députés de son propre parti et deux ministres de son gouvernement.

De toute évidence Cameron avait mal calculé son coup. Les députés de sa majorité se souviennent encore trop bien comment les députés travaillistes payèrent au prix fort la politique de Blair lors des élections qui suivirent l'invasion de l'Irak. L'aile droite du Parti conservateur de Cameron, en particulier, est d'autant plus sensible à ce souvenir que UKIP (Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni), l'étoile montante de la droite nationaliste dans les sondages, s'oppose avec virulence à toute aventure militaire en Syrie, au nom des intérêts militaires britanniques ! Or les élections européennes ne sont pas loin et tout indique qu'une partie de l'électorat conservateur traditionnel pourrait voter UKIP, à la fois parce qu'elle s'identifie à la démagogie antieuropéenne et xénophobe de ce parti et pour sanctionner la politique de Cameron.

C'est dire que la rebuffade essuyée par Cameron n'exprime en rien une opposition de principe des parlementaires à une intervention militaire en Syrie et encore moins leur souci de l'intérêt des peuples - mais seulement des préoccupations étroitement politiciennes et électorales.

Ce qui est vrai des députés de la coalition au pouvoir l'est d'ailleurs tout autant des députés travaillistes. Ils ont voté avec un bel ensemble un amendement au texte de Cameron, repoussé par la majorité des parlementaires. Cet amendement se bornant à exiger comme pré-condition à une intervention militaire qu'elle soit sanctionnée par une décision du Conseil de sécurité de l'ONU - façon plutôt hypocrite d'apparaître opposé à une nouvelle guerre tout en en reconnaissant la légitimité.

Le 29 août, face à sa défaite, Cameron a dû s'engager à ne pas court-circuiter le Parlement en faisant usage de la « prérogative royale » (qui permet au Premier ministre de demander à la reine de donner à l'armée ses ordres de bataille) comme l'avait fait Blair pour l'Irak. Mais à peine quatre jours après, des dirigeants conservateurs faisaient savoir que, si « de nouveaux éléments » survenaient, il était possible que le gouvernement tente de nouveau d'obtenir l'aval du Parlement. Et cela paraît d'autant plus vraisemblable qu'après tout, selon l'arithmétique parlementaire, Cameron n'aurait qu'à faire basculer de son côté six des trente députés de son parti qui ont voté contre sa motion pour emporter le vote.

Autant dire que la participation britannique à une éventuelle intervention militaire impérialiste en Syrie n'est toujours pas à écarter.

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