Nouvel hôpital de Calais : Un « progrès » au goût aigre-doux12/06/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/06/une2341.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Nouvel hôpital de Calais : Un « progrès » au goût aigre-doux

Le nouvel hôpital de Calais est ouvert depuis dix mois, mais les problèmes s'accumulent. L'édifice, achevé à la hâte, a été doté d'équipements bas de gamme. D'où les portes qui ne s'ouvrent pas automatiquement au passage des brancardiers, les cuvettes des WC fissurées qu'il a fallu partout changer, les infiltrations d'eau...

En même temps, l'activité de l'hôpital a augmenté de 15 % (30 % aux Urgences) mais sans embauche supplémentaire. La préoccupation de la direction, comme dans tous les hôpitaux aujourd'hui, est de rogner sur les effectifs. « Polyvalence », « rationalisation », « mutualisation des moyens », autant de notions ronflantes et hypocrites qui entraînent en fait la désorganisation des équipes, le démantèlement des liens nécessaires à l'efficacité du travail en commun, sans compter le départ de médecins usés par les tracasseries administratives et les objectifs de rentabilité.

La chasse aux temps morts, cela signifie moins de temps passé auprès des patients, ce qui entraîne pour tous les agents, et pas seulement les soignants, une déshumanisation de leur tâche. L'hôpital est bien sûr plus beau, plus propre, plus moderne que l'ancien mais, avec ses immenses couloirs déserts, qui sont pour certains malades générateurs d'angoisse, il laisse une impression d'inhumanité.

Et un hôpital qui s'étale tout en longueur, c'est original, mais on perd un temps fou à marcher. Certes, au sous-sol, il y a des trains de chariots pour acheminer le linge, le matériel ou les poubelles, mais dans les services il n'y a pas de tramway, et la direction n'a pas fourni les patins à roulettes. Pour chercher un verre, ou aller dans un autre service, c'est une expédition. Quand le médecin de Pédiatrie doit se rendre aux Urgences, il met trois quarts d'heure avant d'être revenu. Tout le monde a mal aux pieds. À croire que, pour être brancardier, il faut être marathonien.

La climatisation, qui implique le blocage systématique des fenêtres, c'est séduisant en théorie. Mais, avant même d'y avoir mis les pieds, le personnel qui travaille dans les services savait qu'il serait impossible d'éliminer les odeurs et d'aérer les chambres. Maintenant, on recommence des travaux : les fenêtres sont en cours de transformation pour pouvoir s'ouvrir un peu.

Un décor pastel et de belles phrases philosophiques écrites sur les murs, ça fait très joli. Mais, en l'absence d'un fléchage rationnel, d'une signalétique visible indiquant, écrit en gros et en couleurs vives, les noms et la direction des services ou de la sortie, patients et visiteurs se perdent dans ce labyrinthe, et le personnel perd son temps à les ramener sur le bon chemin.

À bien des égards, cet hôpital n'est pas fonctionnel. Et cela parce que, en haut lieu, les décideurs et autres managers ne se soucient pas de savoir comment fonctionnera concrètement, entre les mains de ceux qui l'utilisent au quotidien, l'établissement qu'ils conçoivent.

Ceux qui, par millions, grâce à leur travail, font tourner la société, ne sont jamais invités à donner leur avis sur son fonctionnement.

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