Aluminium Dunkerque (Nord) : Une direction assoiffée de profits12/06/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/06/une2341.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Aluminium Dunkerque (Nord) : Une direction assoiffée de profits

L'usine Aluminium Dunkerque de Loon-Plage (Nord) a un peu plus de vingt ans. 700 salariés, en prenant en compte les intérimaires et les sous-traitants, y produisent chaque année 250 000 tonnes d'aluminium, les deux tiers de la production française.

L'an passé, la direction a mis en place un plan d'économies, appelé LeADer +, pour assurer un soi-disant retour à la compétitivité. Il a pour but de faire travailler plus les opérateurs, en ne remplaçant que rarement les départs en retraite, en renvoyant les intérimaires, en reprenant une partie des travaux effectués par des entreprises sous-traitantes. Comme il y a moins de monde, la direction veut imposer des postes supplémentaires, des congés sont refusés. Et cela dans une région frappée par un chômage officiel de 13,5 %.

Les conditions de travail s'aggravent aussi parce que depuis des années, les installations sont moins entretenues. Il n'est pas rare que des machines soient à l'arrêt faute de pièces de rechange. Le 11 juin, la direction a organisé une cérémonie à l'occasion de la réfection du four à cuire les anodes, qui était au bout du rouleau. Mais le reste de l'usine ne suit pas. D'autant plus que la direction mégote sur la qualité des matières premières, l'alumine, le coke. Après, c'est aux opérateurs de se débrouiller avec des installations qui connaissent souvent des problèmes.

Construite au temps où Pechiney était nationalisé, avec des investissements publics, l'usine a été privatisée à partir de 1995. Le groupe Pechiney a été revendu à Alcan, puis Alcan a été acheté par le géant minier Rio Tinto. C'est une usine très profitable : ses bénéfices avant impôts, amortissements et intérêts (ebitda) ont été de 71 millions d'euros en 2011 et de 77 millions en 2012, soit entre 8 400 et 9 100 euros de bénéfice par salarié et par mois ! Mais Rio Tinto Alcan en veut plus.

La direction met en avant la future facture électrique (23 % du prix de l'aluminium) qui devrait être renégociée avec EDF pour 2017. Pour couvrir son augmentation supposée, la direction déclare qu'il faudrait faire 71 millions d'euros d'économies d'ici là. Bien sûr, elle ne sait rien de ce que sera le marché de l'électricité dans trois ans et demi, ni du cours de l'aluminium, mais cela sert à faire pression sur les travailleurs.

Depuis des mois, la direction accentue la pression morale. Elle affirme que les opérateurs de tel et tel secteur ne sont pas assez productifs et que le travail traîne en longueur. Elle a mis en place un site « Speak-Out » et un numéro de téléphone pour que chacun puisse dénoncer ses collègues au nom de la lutte contre le harcèlement, le vol, etc.

Les travailleurs d'AD sont comme ailleurs inquiets de l'avenir. Rio Tinto Alcan va ainsi vendre à la fin du mois l'usine historique de Saint-Jean-de Maurienne au groupe Trimet. La menace sur l'emploi est bien présente, derrière cette vente, et rien ne dit que le site de Loon-Plage ne sera pas lui aussi considéré comme excédentaire dans les années à venir...

Depuis le début de l'année, la CGT a organisé plusieurs séries de débrayages pour protester contre la politique des patrons. En mars-avril, jusqu'à 200 travailleurs ont participé à ces débrayages et à des assemblées générales. La longue lettre du directeur envoyée au domicile de tous les salariés, pleine de menaces et de chantages, ne les avait pas convaincus. Les ouvriers savent ce qu'ils ont gagné dans les grèves passées, dont le souvenir demeure vif : grève de 14 jours en 1994 sur les salaires et grève de 35 jours en 2000 sur les 35 heures et les RTT.

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