SNCF : Sous couvert de réunification un nouvel éclatement16/05/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/05/une2337.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

SNCF : Sous couvert de réunification un nouvel éclatement

Dans les prochaines semaines, un projet de loi sera examiné au Parlement réformant le secteur ferroviaire. Jean-Louis Bianco, ancien ministre socialiste des Transports, vient de remettre un rapport indiquant les grandes lignes de la réforme. Contrairement à sa présentation, cette réforme accentuera considérablement la coupure de la SNCF puisqu'elle prévoit le transfert d'un tiers des cheminots dans une nouvelle entreprise.

Jusqu'en 1997, la SNCF était propriétaire de la totalité des équipements ferroviaires. Elle en gérait la construction, l'entretien et assurait la circulation des trains. En 1997, le gouvernement de droite puis le gouvernement Jospin instituèrent RFF (Réseau ferré de France), établissement public qui devenait propriétaire de l'infrastructure.

Toutefois en 1997, sans doute par crainte des réactions, les gouvernements n'osèrent pas aller au bout de cette réforme, en transférant à RFF les cheminots chargés de l'infrastructure. Ceux-ci restaient salariés de la SNCF, et RFF payait à la branche infrastructure de la SNCF des redevances pour l'entretien des installations qu'elle lui louait en retour, moyennant péages.

Cette situation kafkaïenne engendrait évidemment une gabegie, des contentieux concernant les travaux, le niveau des péages, la responsabilité en cas de retards ou d'accidents, et des économies importantes sur l'entretien des voies. La logique aurait été, du point de vue tant des cheminots que des usagers, de revenir à l'unicité de la SNCF. Il n'en est pas question. La réforme annoncée prévoit au contraire de pousser à son terme celle de 1997 et de transférer les 52 000 cheminots de la SNCF Infrastructure à un « gestionnaire d'infrastructure unique » (GIU).

Pour masquer cette coupure, qui ampute la SNCF du tiers de ses salariés, la réforme prévoit de coiffer les deux entreprises SNCF et GIU d'une troisième entreprise publique, et de baptiser le tout pompeusement « Pôle public ferroviaire » (PPF).

En réalité, Bianco ne s'en cache pas, la SNCF ainsi réduite au rôle de simple « transporteur » pourra, plus encore qu'aujourd'hui, être mise en concurrence avec les transporteurs privés, déjà présents dans le fret et le transport international, mais qui pourront investir le juteux marché du transport des voyageurs en 2019, tant sur les grandes lignes qu'en région.

Le statut des cheminots est l'autre angle d'attaque. Bianco propose que soit pris rapidement un « décret-socle » valable pour l'ensemble de la branche ferroviaire, auquel s'ajoutera une convention collective qui remplacera la réglementation actuelle du travail de la SNCF. Dans ce cadre, les patrons des entreprises ferroviaires, dont la SNCF fait partie aux côtés des Veolia et autres transporteurs privés, sont à l'offensive préconisant, selon la CGT, de baisser le nombre de jours de repos par an dans une fourchette allant de 104 à 116 contre 114 à 132 aujourd'hui, le nombre de repos doubles (deux jours consécutifs) à 25 contre 52 actuellement et le nombre de dimanches non travaillés à 14 au lieu de 22.

Bianco fixe d'ailleurs l'objectif de 500 millions d'économies à réaliser annuellement par les deux entreprises d'ici cinq ans, par des gains de productivité aux dépens des cheminots et de ce qui reste du service public. Comme on le voit, la gauche n'a rien à envier à la droite dans le démantèlement de la SNCF.

Bianco préconise le vote de cette loi en 2013, afin de la rendre applicable dès le 1er janvier 2015. Aux cheminots et aux usagers de dénoncer cette réforme, qui charcute la SNCF et s'en prend aux conditions de travail des travailleurs du rail et aux conditions de transport des voyageurs.

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