Groupe Doux : Travailleurs licenciés, aviculteurs arnaqués14/03/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/03/une2328.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Groupe Doux : Travailleurs licenciés, aviculteurs arnaqués

Le groupe Doux, en redressement judiciaire depuis juin 2012, a obtenu du tribunal de commerce de Quimper qu'il prolonge sa période d'observation pendant trois mois encore. Pour convaincre le tribunal, le PDG de Doux a expliqué que son entreprise était de nouveau rentable, affirmant qu'« après de nombreux mois d'efforts soutenus, le groupe Doux affiche un nouveau visage ».

Compte-t-il parmi ces « efforts soutenus » la liquidation du pôle frais - partiellement repris par d'autres entreprises - qui s'est soldée en septembre par un millier de licenciements ? Ou bien, dernièrement, la baisse des prix payés aux éleveurs de volaille ? Doux vient en effet de leur imposer une baisse de 40 à 50 euros par tonne de poulets fournie. Sur l'année, cela représente une perte de près de 30 000 euros en moyenne pour un élevage. Ce sont entre 200 et 300 aviculteurs qui vont subir ces pertes dans le cadre de contrats d'intégration avec Doux sur lesquels ils n'ont aucune prise. Le principal concurrent de Doux, Tilly Sabco, a décidé d'imposer une baisse des prix similaire à la centaine d'éleveurs qui travaillent pour lui.

Le prétexte de ces baisses imposées est l'annonce d'une importante diminution des restitutions européennes dont bénéficient Doux et Tilly Sabco, seuls exportateurs européens de volaille congelée vers le Moyen-Orient. Ces restitutions, censées compenser la différence de compétitivité entre les industriels français et leurs concurrents mondiaux, leur rapporteront tout de même plusieurs dizaines de millions d'euros l'année prochaine, même diminuées de moitié. Et pendant des dizaines d'années, elles ont représenté une véritable manne pour ces deux groupes volaillers et contribué à faire la fortune de leurs actionnaires.

Cela n'empêche pas les deux groupes de crier misère auprès des pouvoirs publics, alors que leurs usines tournent à plein du fait de la hausse de la demande de poulets surgelés au Moyen-Orient, et que les bénéfices sont au rendez-vous : 8,5 millions d'euros pour le dernier trimestre 2012 chez Doux, plus de deux millions d'euros pour l'année 2012 chez Tilly-Sabco.

Le jour de la convocation de la direction de Doux au tribunal de commerce de Quimper, près de 125 ouvriers de l'abattoir de Pleucadeuc, dans le Morbihan, avaient eux aussi fait le déplacement pour crier leur ras-le-bol. Dans le cadre du redressement de l'entreprise, Doux a en effet décidé de se débarrasser de cet abattoir de dindes, unique rescapé de la branche frais, qu'il avait cédé à sa filiale Galina en août dernier, en licenciant au passage 270 ouvriers. Aujourd'hui, les 147 restants sont de nouveau sur la sellette, car il est peu probable qu'un repreneur se présente.

Prendre à la gorge les éleveurs de volaille, licencier par milliers les ouvriers de ses usines, voilà la recette de Doux pour renouer avec les bénéfices, ce qui n'empêche pas le gouvernement d'être aux petits soins pour cette entreprise. Stéphane Le Foll, le ministre de l'Agriculture, a en effet annoncé qu'il entendait compenser la perte des restitutions européennes en faisant bénéficier les groupes Doux et Tilly Sabco du crédit d'impôt compétitivité et emploi (CICE), cette subvention conçue par le gouvernement socialiste et présentée comme une solution pour doper la compétitivité des entreprises et... protéger les emplois !

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