La Poste : Coliposte, une zone de non-droit06/03/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/03/une2327.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La Poste : Coliposte, une zone de non-droit

La Poste supprime massivement des emplois : quelque 100 000 ont disparu au cours des onze dernières années, soit près du tiers du personnel. Mais si dans le secteur du courrier il y a une relative érosion du trafic, très loin d'être proportionnelle à la chute brutale des effectifs, ce n'est pas du tout le cas dans le secteur du colis. Avec le développement du commerce par Internet, le trafic augmente, le chiffre d'affaires aussi, et pourtant les effectifs continuent d'y diminuer aussi.

En 1996 les dirigeants de La Poste ont isolé ce secteur devenu plus rentable, sans le filialiser, en créant Coliposte. En dix ans, le chiffre d'affaires et le volume traité y ont doublé, mais dans le même temps les effectifs ont baissé de 25 %, baisse accrue ces dernières années. Fin 2011, les effectifs étaient officiellement de 6 000 salariés.

Dans les plates-formes de tri colis, même très mécanisées, le travail, essentiellement de la manutention, est dur. Les arrêts de maladie et TMS (tendinites, lombalgies...) augmentent. La moindre absence est sanctionnée par la baisse des primes, Bonus qualité et Challenge de fin d'année, alors que les salaires sont très bas. Quant aux TMS déclarés, ils se soldent souvent par un licenciement pour inaptitude à la manutention. De plus les licenciements disciplinaires sont fréquents.

Dans les agences de livraison des colis, ce n'est pas mieux. En décembre dernier, un travailleur de l'agence colis d'Issy-les-Moulineaux se noyait en livrant un paquet sur une péniche. La Poste niait qu'il ait fait partie de ses effectifs, refusait la réunion d'un CHS-CT. Il a fallu le témoignage de ses collègues de travail et l'intervention de l'inspecteur du travail des Hauts-de-Seine pour qu'au moins une enquête soit ouverte.

Ce drame a fait entrevoir à quel point la situation de l'emploi a été déréglementée. Fini, les fonctionnaires, devenus très minoritaires dans ce secteur. À leur tour, les CDI sont considérés comme trop coûteux. Place à l'intérim, aux CDD, aux sous-traitants, aux auto-entrepreneurs, aux « louageurs ». Avec leur propre véhicule, ils travaillent au coup par coup, payés au rendement, 1,50 euro le colis, parfois moins. En Ile-de-France, 70 % des colis seraient ainsi livrés par ces travailleurs occasionnels. Dans toute la France, la sous-traitance serait de 40 % en moyenne.

À juste titre, les syndicats demandent l'intégration de tous les travailleurs sous-traitants qui le veulent dans les effectifs du groupe, et dénoncent des conditions de travail dignes d'un autre âge. Coliposte était considéré comme le laboratoire d'une poste privatisée. Future privatisation ou pas, le personnel a pris de plein fouet les coups d'une direction de choc. Si les salariés se considèrent comme les parents pauvres de La Poste, la direction, elle, considère que Coliposte est un modèle d'avenir.

Tous les travailleurs de La Poste et de ses filiales, quel que soit leur statut, doivent avoir les mêmes droits. Au risque de subir tous à tour de rôle les mêmes attaques, il faut réagir tous ensemble pour mettre un coup d'arrêt à cette dégradation.

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