Essais nucléaires français : Les victimes toujours aussi mal reconnues23/01/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/01/une2321.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Essais nucléaires français : Les victimes toujours aussi mal reconnues

Le 21 décembre dernier, la Commission consultative du secret de la défense nationale a donné la possibilité d'accéder à des documents recensant les mesures effectuées lors des essais nucléaires français en Polynésie entre 1966 et 1996, date d'arrêt des tirs.

Pour les victimes de ces essais, pour la famille de ceux qui sont déjà décédés, s'ouvre avec cette décision un faible espoir de savoir la vérité sur les doses réellement infligées au personnel présent sur les zones de tir, travailleurs ou militaires, ainsi qu'à la population du secteur géographique. Cette mise en lumière ne signifiera pas automatiquement un droit à l'indemnisation, pour les malades ou les familles. En effet, une partie importante des documents reste classée secret-défense. Mais de toute façon, sur les 782 demandes d'indemnisation reçues depuis que la loi Morin de 2010 a entrouvert la porte à une reconnaissance des faits et à une indemnisation, 618 ont déjà été rejetées. Le lien entre irradiation et maladie développée par la victime n'y serait pas probant.

Pourtant, au moins 150 000 victimes potentielles de ces essais ont été recensées. D'après les associations qui, depuis des années, tentent d'obtenir justice pour elles ou leur famille, les choses ont bien peu progressé, y compris depuis la loi Morin. Le nouveau ministre de la Défense, mettant ses pas dans ceux de l'ancien, s'est contenté d'approuver le comité d'indemnisation mis en place par son prédécesseur. La revendication des victimes demeure. Elle est contenue dans une proposition de loi signée en 2008 par Christiane Taubira, qui proposait que, pour être indemnisé, il soit seulement nécessaire d'être atteint d'une des vingt-six maladies de la liste et d'avoir été présent sur ou à proximité des sites d'essais. Le projet est tombé aux oubliettes.

Après la déclassification de certains des documents, l'association polynésienne de défense des victimes, Mururoa e Tatou, de son côté, reste peu optimiste. Or combien de Polynésiens ont eux aussi été victimes d'un des 193 tirs réalisés à Mururoa, Fangataufa ou près d'autres îles, prétendument peu habitées, qu'ils aient été pêcheurs, agriculteurs, employés par les autorités militaires de l'époque, ou tout simplement consommateurs de lait ? Combien de cancéreux parmi eux, comme parmi les appelés, les militaires, les techniciens, les scientifiques qui procédèrent aux essais pour que l'État et la brochette de galonnés qui siégeaient à l'état-major puissent s'enorgueillir de l'arme nucléaire tricolore, et pour les bénéfices des marchands d'armes ?

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