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- Lutte ouvrière n°2319
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Dans les entreprises
Des gaz toxiques dans les conteneurs : Marchandises protégées, travailleurs exposés
Il ne suffit pas que des marchandises aillent d'un bout à l'autre de la planète, enfermées dans les quelque quinze millions de conteneurs en circulation, encore faut-il qu'elles arrivent en bon état. On imagine la croisière de rêve d'une famille de mites dans une cargaison d'écharpes de laine, ou d'une portée de souris dans un lot de nougats. Les conteneurs dans lesquels voyagent les marchandises sont donc traités, avant d'être fermés, avec les produits chimiques adéquats. De plus, ces grosses boîtes embarquent, outre les marchandises, un peu de l'atmosphère du pays, y compris éventuellement ses insectes, ses microbes et ses virus. D'où, là encore, un traitement adapté par fumigation.
Enfin, certaines marchandises, les meubles entre autres, contiennent des produits, colles, laques, etc., qui dégagent eux-mêmes des gaz toxiques. Tout cela, enfermé quelques semaines en milieu confiné, est ouvert à l'arrivée, en premier lieu par les douaniers et les autres travailleurs des ports, et de toute façon à la réception.
Après des cas d'intoxication, les syndicats des ports belges, hollandais et allemands ont fait procéder à des analyses : en 2006, 97 % des conteneurs contenaient des traces de gaz toxiques, dont un tiers à des doses dangereuses. Mais aucun conteneur n'affichait de mise en garde, aucune entreprise n'effectuait d'analyse préalable, aucune ventilation n'était prévue.
Depuis, pour les ports de l'Europe du Nord, une législation a été mise au point, des précautions rendues obligatoires, des cabines de ventilation installées. Malgré tout, en 2010 encore, deux travailleurs des Pays-Bas ont été gravement intoxiqués, dont un a passé cinq jours dans le coma et l'autre a perdu le goût et l'odorat.
En France, c'est en 2010 que la CGT des douanes, en particulier au Havre, qui est le premier port à conteneurs du pays, a lancé une alerte sanitaire. Pour le moment, seule l'administration des douanes a commencé à réagir, fournissant des protections à ses agents et leur conseillant de se tenir sur le côté en ouvrant les conteneurs... Aucune cabine de ventilation n'a encore été installée. Pourtant, si on ne connaît pas encore tous les dangers de ces gaz clandestins, on sait que les dockers ont une espérance de vie inférieure de huit ans à la moyenne.
On pourrait aussi se poser la question de ce que respirent les travailleurs qui, au départ, procèdent à ces fumigations ou utilisent les colles et les laques toxiques. Et on arriverait à la même réponse que pour les ports européens : pour les fabricants, les marchandises sont plus précieuses que ceux qui les produisent et les transportent.