Derrière la compétitivité, il n'y a pas l'emploi mais les profits07/11/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/11/une2310.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Derrière la compétitivité, il n'y a pas l'emploi mais les profits

Avec la publication du rapport Gallois, le gouvernement a élevé la compétitivité au rang de grande cause nationale : « Derrière la compétitivité, il y a l'emploi, c'est-à-dire l'avenir », a dit Hollande. Comme d'habitude, le gouvernement s'apprête à faire des cadeaux au patronat au nom de l'emploi.

Car, si le gouvernement remplace le « choc de compétitivité » de Gallois, par un « pacte », il ne fait plus de doute que le grand patronat va être servi, et bien servi. Et il est sûr que les travailleurs paieront ce qui sera cédé au patronat.

Et les cadeaux au patronat ne se limiteront pas à cela. Le gouvernement veut aussi l'aider à moderniser ses installations et à investir car, paraît-il, la France est en retard en matière de robotisation et d'innovation.

Le gouvernement va donc continuer de déverser des milliards sur les entreprises. Mais les milliards iront sur les comptes en banque des actionnaires et dans la spéculation parce que, dans cette période de crise, les patrons préfèrent spéculer qu'investir dans la production. Quant aux licenciements et aux fermetures d'usines, qui plongent chaque semaine des milliers de travailleurs dans le chômage, ils se poursuivront. Sous couvert de grande cause nationale, les mesures de compétitivité serviront la cause patronale !

Pour le patronat, la compétitivité est une obsession. Et comment peut-il en être autrement, quand le système capitaliste est basé sur la concurrence ? C'est à qui prendra les parts de marché de ses concurrents. Le patronat est engagé dans une guerre économique permanente, de plus en plus féroce du fait de la crise, mais ce sont les travailleurs qui en sont les victimes.

C'est sur le dos des travailleurs que tous les patrons, les petits comme les gros, compensent leurs mauvaises affaires. À la moindre baisse des commandes, les intérimaires ou les CDD sont renvoyés. Les autres travailleurs sont mis sous pression pour qu'ils en fassent toujours plus. Et quand cela ne suffit pas au patron pour « être compétitif », il taille dans le vif en licenciant ou en fermant une usine. Les capitalistes assurent leur compétitivité avec la peau des travailleurs.

Un capitaliste ne fait pas le poids dans la concurrence ? C'est forcément la faute des travailleurs ! C'est que les salaires sont trop élevés, c'est qu'il y a trop de cotisations sociales, c'est à cause des 35 heures, du manque de flexibilité ! Le patronat sait bien que le coût du travail en France est équivalent à celui de l'Allemagne et que les salariés travaillent en moyenne 39,5 heures comme dans bien d'autres pays, mais il ne recule devant aucun mensonge pour faire son chantage. Le même chantage est servi aux travailleurs du monde entier, même aux ouvriers chinois auxquels on explique que les Vietnamiens sont plus compétitifs !

Si tenir dans la concurrence nécessite d'abaisser les prix, que les patrons le fassent donc, mais pas au détriment des travailleurs. Le patronat réclame 30 à 40 milliards d'euros de baisse des cotisations, mais les seuls patrons du CAC 40 ont versé, en 2011, 39 milliards aux actionnaires. Il y a là de quoi rendre les prix concurrentiels. Mais la bourgeoisie ne le fera pas car, sous prétexte de compétitivité, elle veut imposer ses intérêts de classe, augmenter les profits du capital en démolissant les revenus des travailleurs. Et le gouvernement, qui s'amuse à faire croire à un « pacte de compétitivité », fait son jeu.

« Nous avons besoin d'une véritable mobilisation et, je ne crains pas de le dire, d'un véritable patriotisme », a déclaré Louis Gallois. Aujourd'hui, patronat et gouvernement demandent du patriotisme dans leur guerre commerciale, mais qui sait si, demain, ils n'en demanderont pas dans la guerre tout court. Ils l'ont fait pour les guerres coloniales et pour les deux guerres mondiales, où des millions de travailleurs ont servi de chair à canon pour les intérêts de la bourgeoisie.

« On croit se battre pour la patrie, on meurt pour les industriels », a dit Anatole France, après la Première Guerre mondiale. Eh bien, les travailleurs n'ont pas à accepter cela dans la guerre commerciale d'aujourd'hui, et encore moins en version plus grave, demain.

Les travailleurs n'ont pas à marcher dans cette union sacrée. Ils ont leur propre combat à mener, pour défendre leurs emplois, leurs salaires et leurs conditions de vie. Et, au-delà de ce combat immédiat, les travailleurs doivent affirmer leur rejet de cette économie basée sur la concurrence et la compétition, qui conduit à l'anarchie, à la violence et aux guerres.

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