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- Lutte ouvrière n°2290
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Editorial
Le Parti socialiste a tous les pouvoirs politiques ; que va-t-il en faire ?
Hollande a donc la majorité parlementaire qu'il voulait. Le Parti socialiste a même, à lui seul, la majorité absolue à l'Assemblée nationale. Entre la présidence de la République, le gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat, il a donc la totalité des pouvoirs politiques dans le cadre des institutions.
Les travailleurs n'ont pourtant pas à se faire d'illusions. La gauche ne se servira pas de ce pouvoir pour protéger les travailleurs, les salariés, les couches populaires, dans cette période de crise. Avec la fin de la campagne électorale, s'achève même le temps des gestes symboliques qui ont précédé le deuxième tour des législatives.
Non seulement le gouvernement laissera les mains totalement libres au grand patronat pour licencier, pour fermer des entreprises considérées comme non rentables, pour abaisser les salaires, mais il prendra lui-même des mesures d'austérité qui viseront les classes populaires, tout comme les mesures d'austérité de la droite. Maintenant que les élections sont terminées, écoutons les dirigeants et les commentateurs politiques nous dire que la rigueur est inévitable et qu'il faut se préparer à des sacrifices supplémentaires. Cela ne les a pas empêchés pendant les campagnes électorales de nous expliquer à quel point l'avenir dépendait de notre vote ! La mauvaise farce !
« Leur » démocratie, c'est de permettre aux exploités de changer, par leurs votes, d'équipe gouvernementale pour que rien ne change.
Il ne peut pas en être autrement dans le cadre des institutions étatiques faites pour servir les intérêts de la bourgeoisie, et avant tout de ses couches les plus riches.
Dans cette période de crise de l'économie capitaliste, plus que jamais les intérêts des exploiteurs capitalistes et ceux des salariés exploités sont totalement opposés. Préserver les profits, les revenus du capital, c'est aggraver les conditions d'existence des salariés.
Cette aggravation n'est cependant pas une fatalité. La classe ouvrière a les moyens de s'y opposer par ses luttes collectives. Ces luttes, que l'avidité du grand patronat finira par déclencher, ne pourront être pleinement efficaces que si les travailleurs prennent conscience qu'ils ont le droit de mettre en avant les objectifs indispensables pour préserver leur emploi et le pouvoir d'achat de leur salaire, leur seul moyen d'existence, quoi qu'en disent les hommes politiques qui servent l'ordre capitaliste.
Pour résorber le chômage, il faut imposer la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire et l'interdiction des licenciements collectifs. Pour préserver le pouvoir d'achat, il faut l'indexation automatique des salaires et des retraites sur les prix, l'échelle mobile des salaires.
Les élections terminées, ces objectifs vitaux restent à imposer. Ils sont indispensables pour empêcher le grand patronat et les banquiers, avec la collaboration du gouvernement, de pousser vers la pauvreté une partie croissante de la classe sociale dont le travail fait tourner l'économie. À la bourgeoisie et à ses porte-parole politiques qui invoquent le manque de moyens du fait de la crise ou le montant de la dette publique, il faut opposer l'exigence de rendre publics et contrôlables les comptes de toutes les entreprises, de toutes les banques. Seule la fin du secret des affaires pourrait dévoiler que les licenciements, les sacrifices sur les salaires, ne sont pas inévitables. Pas plus que ne sont inévitables les coupes claires dans les dépenses des services publics utiles aux classes populaires. Tout cela résulte du choix de privilégier les revenus du capital au détriment des travailleurs et de l'intérêt de la collectivité.
Mais on ne peut pas attendre des institutions de la bourgeoisie qu'elles fassent le choix inverse : préserver les conditions d'existence des classes laborieuses en puisant dans les revenus de la bourgeoisie et, s'il le faut, dans ses fortunes privées. Cela, il faudra l'imposer nous-mêmes. Notre survie dépendra de notre capacité à le faire.
Lutte Ouvrière n'a pas besoin de députés pour continuer à agir dans les entreprises, dans les quartiers populaires, afin de propager ce programme de lutte et la conscience de classe. Elle continuera à oeuvrer pour la construction d'un parti représentant les intérêts matériels et politiques de la classe ouvrière, un parti qui ne cherche pas à s'intégrer dans les institutions politiques de la bourgeoisie mais qui les combatte, avec pour objectif le renversement du pouvoir de cette bourgeoisie et son expropriation.
Éditorial des bulletins d'entreprise du 18 juin