Brésil - le nouveau code forestier : Un permis de détruire l'environnement13/06/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/06/une2289.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil - le nouveau code forestier : Un permis de détruire l'environnement

Le 25 mai, la présidente Dilma Rousseff s'est prononcée sur le nouveau code forestier brésilien. Cela faisait des mois que toutes les organisations de protection de l'environnement, brésiliennes et internationales, lui demandaient d'y mettre son veto. Mais, au mépris de sa promesse de s'opposer à toute amnistie des déboiseurs, elle a accepté ce nouveau code, avec quelques modifications de détail.

Le précédent code forestier datait de 1965. À cette époque, les généraux au pouvoir voulaient réguler l'Amazonie, en limitant les déboisements sauvages, la destruction des sols fragiles, l'ensablement des cours d'eau, la disparition d'espèces animales et végétales et l'élimination des peuples indiens. Dans l'immense bassin de l'Amazone, grand comme huit fois la France et charriant un cinquième des eaux douces du globe, la végétation devait être entièrement préservée dans les Aires de préservation permanente, comprenant les Territoires indigènes et les Unités de conservation.

Quant aux exploitations agricoles, elles devaient maintenir la végétation originelle sur une partie de leur superficie (35 % en Amazonie), la réserve légale, comprenant obligatoirement les sources, lacs, lagunes et mangroves, le haut des collines et une bande de largeur variable sur les rives de chaque cours d'eau. En cas de défrichement de ces zones, la loi prévoyait des amendes ainsi que l'obligation de reconstituer la forêt détruite.

Les déboisements se sont intensifiés ces dernières années, augmentant de 27 % l'an passé. Des millions d'hectares ont été défrichés dans les dix États qui constituent l'Amazonie par des grands propriétaires, souvent des groupes financiers, pour l'élevage des bovins et la culture intensive du soja, du maïs et de la canne à sucre, secteurs dans lesquels le Brésil est un des principaux producteurs mondiaux, l'agrobusiness étant le plus gros exportateur du pays. Lula a en son temps autorisé les OGM, légalisé les occupations illégales de terres publiques jusqu'à 1 500 hectares, et accordé des crédits publics à ces voleurs.

Le groupe de pression de l'agro-industrie a fait campagne tous azimuts. C'est selon lui la prospérité du pays et l'alimentation des plus pauvres qui sont en jeu. Réduire les plantations amènerait une hausse généralisée des prix alimentaires, dit-il.

Ce lobby, qui fustige les « chiites » écologistes, les ONG étrangères et la « dictature de l'environnement », dispose de plus de 300 des 513 députés, de droite mais aussi de gauche, à l'Assemblée. Un des plus actifs est Aldo Rebelo, leader du Parti communiste du Brésil (PCdoB), président de l'Assemblée sous Lula et actuel ministre des Sports. Sous prétexte de croissance et de développement, il est aujourd'hui l'allié des grands propriétaires déboiseurs, expulseurs d'Indiens, qui réduisent leurs salariés à un semi-esclavage.

Ces députés « ruralistes » ont donc obtenu leur réforme du code forestier. Quant aux opposants à la réforme, la plupart ont voté en faveur de la version adoptée en décembre par le Sénat et guère meilleure. Désormais, sous réserve de l'acceptation finale de l'Assemblée, les amendes pour déforestation antérieure à juillet 2008 sont amnistiées. La construction de fermes sur les zones défrichées avant cette date est autorisée. Les rubans de forêt le long des cours d'eau sont réduits. La réserve légale est diminuée dans les États et les communes où les zones protégées sont déjà importantes, c'est-à-dire en Amazonie. Et surtout les déboiseurs sont dispensés de reconstituer la forêt détruite.

À terme, ce sont 690 000 kilomètres carrés de végétation qui seraient menacés : 10 % de l'Amazonie et 35 % de ce qui reste de la forêt vierge atlantique. Les pollutions dues aux brûlis, qui font du Brésil le quatrième émetteur mondial de CO2, vont continuer de plus belle. L'érosion va provoquer ici ou là inondations et éboulements de collines. Qu'à cela ne tienne : les industriels de la viande et du soja vont pouvoir augmenter leurs exportations et leurs profits.

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