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Leur société
Rémunérations de PDG : L'arbre et la forêt
Mardi 10 avril, une centaine de salariés ont manifesté devant le siège parisien de Publicis, pour protester contre le bonus de 16 millions que le conseil d'administration du groupe publicitaire a attribué fin mars à son PDG, Maurice Lévy.
Les médias ont donc un peu reparlé de ce gros lot scandaleux. Certains l'ont parfois comparé à ce que touchent les salariés du groupe Publicis, telle cette salariée d'une de ses filiales, venue manifester, qui « gagne 1 400 euros net par mois, prime d'ancienneté comprise ».
Du coup, le PDG de Publicis, qui se tenait coi depuis des semaines, a décidé de se justifier face aux médias, en mettant en cause une « polémique » qui aurait, selon lui, pour but « d'abîmer un travail exemplaire, une entreprise formidable et un patron (...) qui s'est toujours conduit de manière exemplaire ».
Ce monsieur formidable, exemplaire, et modeste faudrait-il ajouter, s'était récemment déclaré prêt, avec une quinzaine de ses pareils, à payer plus d'impôts. Avec ce qu'il vient de toucher, il en a certes amplement les moyens. Il l'a d'ailleurs reconnu sur RTL : « C'est vrai que c'est beaucoup d'argent et que cela peut être choquant » a-t-il dit, ajoutant dans la foulée : « Mais c'est de l'argent gagné sur la réussite, réussite dont je suis extraordinairement fier (...) pour mon pays, pour mon entreprise, pour mes actionnaires. »
La réussite en question -- le chiffre d'affaires de Publicis a été multiplié par 40 en quinze ans -- ses salariés y sont pour beaucoup, même si, en bon PDG, il n'en parle pas. En revanche, il n'oublie pas de saluer ses actionnaires, en indiquant au passage que les 16 millions qu'ils lui ont accordés sont finalement peu de chose. Cela fait « un peu moins d'un demi-centime par euro gagné » par ces mêmes actionnaires, a-t-il précisé.
Autrement dit, quand ce PDG reçoit 16 millions, une somme énorme pour des salariés puisque vingt travailleurs payés au smic ne gagneront pas autant en toute une vie de travail, ses actionnaires, eux, ont empoché plus de deux cents fois plus que lui !
Cela, même les médias qui ont fait leur titre sur le « bonus doré » du PDG de Publicis se sont abstenus d'en parler. Après tout, si les PDG sont (très) bien payés, c'est aussi pour occuper le devant de la scène, et au besoin faire écran devant ceux qui doivent rester dans l'ombre : leurs propres patrons, les détenteurs du capital.