Procès de l'Érika : Permis de polluer13/04/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/04/une2280.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Procès de l'Érika : Permis de polluer

Douze ans après le naufrage de l'Érika, ce pétrolier vétuste affrété par le groupe Total qui, en déversant 30 000 tonnes de fuel lourd, avait pollué près de 400 km du littoral atlantique, la Cour de cassation pourrait annuler toute la procédure judiciaire précédente, donc le jugement qui condamnait le trust pétrolier.

Cette entreprise, qui faisait transporter son pétrole par un bateau-poubelle âgé de vingt-cinq ans et à la coque corrodée, avait pourtant été déjà exonérée par la justice de toute responsabilité civile. Outre que cela évitait à Total de payer davantage d'indemnités, cela permettait à ses responsables d'éviter la prison. Cependant en 2007, au terme d'une très longue procédure, l'entreprise avait tout de même été condamnée au pénal à verser ... 370 000 euros !

Cette somme est encore dérisoire au regard des profits de Total, estimés en 2011 à plus de dix milliards de dollars, dérisoire également eu égard aux dommages estimés par les parties civiles à un milliard d'euros. À l'époque, il avait fallu nettoyer les plages, entre 80 000 à 300 000 oiseaux avaient été mazoutés, les parcs ostréicoles, la pêche ainsi que le tourisme et l'agriculture avaient été durement touchés. Total n'a jamais désarmé, préférant se payer des avocats d'affaires réputés. C'était la première fois qu'en Europe un groupe pétrolier se voyait ainsi condamné pour avoir pollué le littoral, et Total ne voulait pas que cela crée un précédent.

Ce n'est donc pas seulement la somme à payer que Total veut récupérer, c'est sa responsabilité pénale qu'elle refuse, parce qu'une telle condamnation risquerait de faire jurisprudence. Ses avocats ont fait valoir que Total avait affrété un bateau qui battait pavillon maltais : c'est donc un bateau étranger qui a fait naufrage, et cela dans les eaux internationales. Et le représentant de l'État, l'avocat général de la Cour de cassation, abonde dans son sens pour dire que la législation française ne permet pas de poursuivre un bateau étranger hors des eaux territoriales. Qu'importe si le donneur d'ordres Total est bien une entreprise française, qui a outrageusement négligé les règles minimums de sécurité en confiant sa cargaison à un navire-poubelle !

Si la Cour de cassation qui doit se prononcer en mai prochain suit l'avis de l'avocat général, cela reviendra à donner le permis de polluer à tous les groupes pétroliers battant pavillon étranger, qui pourront en toute impunité continuer à affréter des bateaux vétustes et dangereux.

Partager