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- Lutte ouvrière n°2272
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Groupe Cauval (Aveyron) : 170 licenciements et deux usines fermées, pendant que l'argent public arrose les requins du meuble
Mercredi 8 février, les usines Valaubrac et Amarilis, en Aveyron, ont fermé leurs portes. 170 ouvriers se retrouvent sur le carreau. Ils ont en moyenne 48 ans, et bien peu d'espoir de retrouver un travail. Ces deux usines fabriquaient des meubles de cuisine, et ces licenciements viennent s'ajouter à la longue liste de suppressions d'emplois dans l'ameublement.
Concurrence des pays de l'Est, charges sociales trop élevées : ce sont les refrains qu'on entend en général pour les justifier. Mais ce que cette affaire met surtout en lumière, c'est que le véritable problème est la domination des capitalistes sur l'économie.
Valaubrac (anciennement Espalux) et Amarilis, comme beaucoup de PME familiales du meuble, ont été rachetées par le groupe Cauval, numéro 1 français du secteur. Ce groupe a été monté par deux flibustiers de la finance : Gilles Silberman, ancien avocat d'affaires du milliardaire Pinault, et Gilles Wahnich. Ils sont des spécialistes du rachat, de la restructuration et de la revente d'entreprises en difficulté. Il s'agit de vider les trésoreries et de presser les travailleurs comme des citrons, avant de revendre ou de fermer boutique, avec à la clé d'énormes bénéfices. Cela leur a permis d'arriver aujourd'hui, d'après la presse, dans les 500 premières fortunes de France. Ils avaient déjà défrayé la chronique dans l'affaire du « trou du Crédit Lyonnais » dans les années 1990, profitant alors largement des générosités d'Altus finance, filiale du Crédit Lyonnais spécialisée dans les montages financiers douteux.
En Aveyron, ils soumettent depuis des années leurs usines au chantage à la fermeture et aux plans de licenciements. Depuis plus d'un an, Valaubrac et Amarilis étaient sur la sellette. Cauval utilise une nébuleuse de sociétés immobilières et financières, et n'a pas eu de difficultés à présenter comme inéluctable la fermeture des deux sites, sauf si les collectivités locales cédaient à son chantage. Ainsi, il exigeait sept millions d'euros de la communauté de communes de Bozouls pour racheter les murs de l'usine Valaubrac, qui serait devenue locataire. Les élus ont fini par refuser : Bozouls est un gros village de 3 000 habitants, et se serait retrouvé endetté pour des décennies. En plus, le préfet a interdit la transaction, qui était illégale. Et enfin les murs n'appartenaient même pas à l'usine, mais à une obscure société civile immobilière.
L'usine a donc fermé, sans qu'aucune autorité ne demande pour autant de comptes aux actionnaires. La direction et le syndicat maison ont même tenté de rejeter la responsabilité sur les élus locaux. Mais c'est le slogan « Silberman escroc, voyou, bandit » qui a fusé chez les ouvriers à l'annonce de la fermeture. D'autant que, le jour même de l'annonce par le tribunal de la fermeture définitive des deux usines, fin janvier, on apprenait qu'une nouvelle usine de matelas Treca était inaugurée en grande pompe par Silberman dans le Loir-et-Cher, avec à ses côtés le ministre de la Ville, Maurice Leroy. Il n'y avait aucune création d'emploi, puisqu'il s'agissait de remplacer une usine vétuste voisine, mais deux millions de subventions du Conseil général (dont Leroy est le président), plus la garantie pour quatre millions d'emprunts bancaires !
Voilà comment manoeuvrent ces gens-là, qui aujourd'hui se croient à l'abri de la colère des travailleurs. Peut-être à tort, et peut-être pas pour longtemps.