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Leur société
Les accords compétitivité-emploi : Attaquer les conventions collectives pour attaquer les travailleurs
Dans son show télévisé du 29 janvier, Sarkozy a repris une idée déjà évoquée le 18 lors du « sommet social » avec les confédérations syndicales : les accords compétitivité-emploi, négociés et signés entreprise par entreprise. Il s'agit de rien de moins que d'autoriser les patrons à diminuer les horaires et les salaires des travailleurs, ou à augmenter les horaires sans augmenter les salaires. Il s'agit surtout, sous prétexte de permettre aux entreprises d'affronter des « périodes difficiles » et de renforcer leur « compétitivité », de permettre aux patrons de se débarrasser des conventions collectives, si ce n'est du Code du travail.
Les commentateurs autorisés et les politiciens professionnels ont discuté de la pertinence de la mesure, de la façon dont le président candidat l'a annoncée, de la place qu'elle tiendrait dans sa campagne, et de toutes ces choses qui n'ont d'importance que dans leur petit monde, sans même se demander ce que pouvait vouloir dire une baisse de salaire quand on a 1 200 euros par mois, voire moins, pour nourrir sa famille.
La compétitivité n'est comme toujours qu'un faux nez. Car si les capitalistes voulaient réellement l'améliorer, c'est-à-dire vendre moins cher leurs produits à qualité égale, ils auraient une solution très simple à portée de main : diminuer la part réservée aux bénéfices, prendre sur les dividendes versés aux actionnaires. Mais non, ce qu'ils veulent c'est conserver, voire augmenter la part des profits, et pour cela diminuer la part des salaires. Ce projet de loi est prévu pour ce faire et fêté pour cette raison par les représentants du patronat.
Mais, au-delà de ce nouveau cadeau au patronat et de ce nouveau vol sur les salaires, les accords compétitivité-emploi auraient une conséquence plus pernicieuse et plus dangereuse encore pour les travailleurs.
En effet, « négociés » sous la menace du chômage et signés entreprise par entreprise, ces accords auraient force de loi, au-dessus des conventions collectives, au-dessus même peut-être du Code du travail. Ils laisseraient ainsi les travailleurs seuls face à leur patron, sans même avoir le filet de sécurité des textes légaux. Tout ce qui a été obtenu par des dizaines d'années de luttes, tout ce que la grève générale de 1936 avait arraché, le fait que la classe ouvrière ait des garanties minimum collectives serait foulé aux pieds. Il suffit d'imaginer ce que pourrait exiger le dernier employeur d'une petite ville ouvrière ravagée par le chômage, et elles sont nombreuses, pour mesurer la gravité de la menace : se voir imposer n'importe quel horaire, au tarif le plus bas possible. Et cela légalement, c'est-à-dire sans aucun recours possible auprès de l'Inspection du travail ou des Prud'hommes. Ce serait revenir à la totale liberté patronale, c'est-à-dire à l'arbitraire le plus complet et à l'exploitation la plus brutale.
De tout cela, il ne doit pas être question.