Presse : Une liberté très surveillée24/11/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/11/une2260.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Presse : Une liberté très surveillée

Un article paru le 14 novembre dans le quotidien économique La Tribune affirmait, en pleine polémique politicienne sur le nucléaire entre les Verts, le PS et la droite : « EDF se prépare à abandonner le modèle EPR », celui de la super-centrale de Flamanville. Et il précisait qu'EDF, tout en défendant publiquement l'EPR, « travaille avec Areva et les Chinois à un nouveau réacteur ».

Mécontente, la direction d'EDF a aussitôt retiré son budget publicitaire à La Tribune. Comme elle est l'un de ses principaux annonceurs, cette mesure de rétorsion se solde par un manque à gagner pour ce journal évalué à 80 000 euros d'ici à fin décembre.

Ce cas n'est pas isolé. En septembre dernier, en pleine affaire du Mediator, une journaliste médicale avait relaté sur RTL comment le groupe Servier, qui produisait ce médicament dangereux, avait pendant des années obtenu de son journal, dans lequel il faisait de la publicité, de pouvoir relire, censurer, voire réécrire tous les articles concernant le Mediator. Et il y a quelques années, on avait appris comment le groupe LVMH, leader mondial de l'industrie du luxe et un des premiers annonceurs de ce pays, avait puni Le Nouvel Observateur en le privant de 230 000 euros de publicité à cause d'un article évoquant un projet bancaire de LVMH tombé à l'eau.

Les ventes ne représentent guère plus de la moitié des recettes de la presse écrite. Le reste provient de la publicité, principalement de gros annonceurs. Ces derniers, tels EDF, les marques automobiles, les groupes pharmaceutiques, les banques, les compagnies aériennes, les grands noms du luxe, les géants de la distribution, etc., ne manquent donc pas d'arguments sonnants et trébuchants pour se faire entendre des rédactions. Et cela même quand, par exception, on ne retrouve pas ces très grands groupes capitalistes aux postes de commande, en tant qu'actionnaires, des sociétés qui possèdent la quasi-totalité des titres de presse, et plus largement des médias.

Dans le cas de la presse magazine spécialisée (auto, moto, mode, immobilier, beauté...), la plupart des publications s'apparentent à des catalogues financés par les annonceurs, destinés à orienter le lecteur vers l'achat de leurs produits. S'agissant des quotidiens gratuits, leur existence même n'est possible que parce que la publicité les finance intégralement. Quant à la grande presse d'information, les déboires récents de La Tribune le rappellent : ou elle file doux, ou elle risque de se retrouver sur la paille, privée de manne publicitaire.

Alors, si la grande presse commerciale se dit libre, elle est surtout libre de dire ce qui convient à ceux qui détiennent les cordons de la bourse : ses actionnaires et les grosses sociétés qui contrôlent ses revenus via la publicité.

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